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Sans doute; et la réflexion de Marc-Aurèle n’est
point telle qu’on ne la puisse aisément réfuter. Le calem
bour est peu considéré. Par où l’on remarquerait que les cas,
où l’on supposait prendre sur le fait cette confusion des
mots avec les choses, étaient aussi bien ceux où la confusion
déjà menaçait ruine: comme si son défaut seul, et déjà sa
fissure retenait notre attention.
Notre exigence aussi bien, avec ce défaut,
prend un nouvel aspect.
VI. FLATTERIES AU LANGAGE.
Mire parle, et se laisse parler. Sans effort, il
déplace et rapproche ou bien écarte les villes, de l’or les
jours ou les nuits. La langue cependant vient à lui fourcher,
et nous demandons : « Est-ce bien ce mot qu’il cherchait ? »
Quelque auditeur se plaint : « Nous ne nous entendons
pas, réplique Mire ; comprenez mieux mes paroles, j’ai
voulu dire... » Aussitôt se montrent les mots, et tels que
des signes: c’est ou le sens se trouve menacé, ne joue pas,
retombe de son haut, de façon que l’on y distingue la pensée
d’un côté, de l’autre le mot inerte. Gomme un joueur de ten
nis, qui vient de manquer son coup, regarde avec étonne
ment un bras, une raquette, tout à l’heure parties de lui,
à présent étrangers, et faits d’une matière difficile.
L’idée du signe porte, à côté de cet
échec et juste à son occasion, la marque d’une con
fiance. Elle nous informe que les mots, quoi qu’il en semble
— et celui-là même qui vient de décevoir — appartien
nent aux idées, qu’il est entre eux une convenance natu
relle, qu’ils vont refaire sens. Idée pratique, de défense, et
non pas la simple observation que l’on avait pu croire; elle
répète: chaque idée a son mot, chaque mot son idée. Un
peureux ainsi se dit: « Comme je suis calme, s’est surpre
nant comme je suis calme », et s’encourage.
Par là se réjoignent les faits qüe tout d’abord
l’on opposait. C’est bien parce qu’ils veulent le rendre
signe, et sur lui obtenir ce succès, que Gilia et Atlys,
à partir du mot qui les déroute, vont imaginer quelque pen
sée, dont ce mot ne soit plus que l’apparence; telle est leur
défense contre un langage, dangereux ou gênant, où il se