110
MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX
correspondant du Havre se trouva déten
teur, pour moi, d’une somme suffisante en
argent français, je lui recommandai cer
taines spéculations, qui furent heureuses ;
car, depuis deux mille ans, j’ai acquis quel
que expérience, j’ai eu le temps de réfléchir.
Ainsi moi, le Juif Errant, je suis devenu
fort raisonnablement riche, en moins de
temps même que je ne croyais, à cause du
change, auquel le Seigneur n’avait pas
pensé. Ayant acquis cette terre en Angle
terre, je suis devenu également baronnet, ce
qui n’est pas bien difficile si l’on est géné
reux au moment des élections. Voilà com
ment Ahasvérus est devenu sir Richard
Ashver.
» — Mais, objectai-je, puisque vous ne
devez jamais avoir que cinq sous?...
» — Dans ma poche, répondit douce
ment sir Richard, dans ma poche ! Mais du
temps de Ponce-Pilate on ne connaissait
ni le compte-courant, ni le chèque. J’en
profitai. Ma fortune est déposée en compte-