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opiniâtre, raisonenuse" ét ces trois qua
lificatifs pourraient servir de base à tout
le développement futur du tempérament
stendhalien.
II. faut considérer encore, et surtout,
la première enfance de Beyle, toute en
surveillance et contraintes s’opposant
à ces tendances naturelles. Ce que
dispense de douceur et de sensibilité
plus fine la direction maternelle ; ce que
fait rayonner dans une vie d’enfant, la
grâce et la douceur d’une femme char
mante, il s’en trouva dépourvu à sept
ans. Trop tard, pour qu’il ne s’attristât
point, du changement, et trop tôt pour
qu’il eût en lui de quoi s’en passer. Il se
trouva donc, sans défense et sans moyen
de résister, autre que le reploiement en
lui-même, livré aux froideurs et aux
hypocrisies fades d’éducateurs de pro
vince Son père ne fût jamais pour lui
qu’un étranger aimable, et les parents
qui lui restaient, — du moins la plupart,
<— ne l’aimaient pas. Il sut le leur rendre.
Mais il y perdit l’expansive vivacité des
enfants et leur spontanéité. Que sa
nature fut avide d’émotions douces et
de caresses ; que sa sensibilité se bles
sât irrémédiablement aux laideurs et aux
vulgarités environnantes, voilà ce dont
personne ne se souciait. Il ne s’agiesait
que de le limiter à ce qu’admet ou
souhaite la mesquinerie de la tradition
bourgeoise. On voulut le brider, l’amoin
drir moralement. Et combien de chances
y avait-il qu’il en réchappât ? Mais il
s’est fait que Stendhal, meurtri cruelle
ment, résista. Il se raidit et contracta
peu-à-peu et dès lors, son habitude de
vie intérieure, sincère, absolument et
volontiers cynique. De ce cynisme, man
teau quelquefois des âmes trop tendres.
Il s’arrangea pour vivre ainsi jusqu’à
16 ans.
Paris s’offre alors à lui, et pour la
première fois de sa vie, Stendhal se voit
libre, avec qu’eile ivresse ! Mais, s’il
s’enthousiasme alors, ce n'est pas de
l’exaltation inférieure d’ambitieux. A
16 ans, l’est-on d’ailleurs jamais ? On
peut se plaire à se l’imaginer ; mais on
croit projet d’ambition ce qui n’est que
désir d’activités. Peut-être, d’ailleurs,
quelque ambition vivait-elle déjà en
cette âme singulière. Toutefois, il y
avait surtout, dans sa joie de toucher le
sol magique de Paris, la détente d’une
sensibilité jusqu’alors prisonnière. Il y
avait, après le désir, l’espérance de
participer aux voluptés de la passion
et du sentiment comme aux luttes des
idées.
C’est alors que vinrent au jour, les
marques, gardées par Stendhal, d’une
enfance âprement défendue contre le
mensonge et la vulgarité provin
ciales :
Il vint à Paris accoutumé à contenir
en lui les plus chères de ses émotions, et
à se refuser de traduire ses pensées les
plus naturelles ; à n’être jamais compris ;
à vivre en inconnu parmi les siens. Il
apporte donc un cœur sur la défensive
et pourtant avide de se livrer, en même
temps qu’une intelligence ironique et
peu indulgente aux hypocrisies de tout
genre, dont il a trop souffert....
La vie dans la société parisienne ne
changera plus rien aux particularités
essentielles de sa personnalité, qui est
déjà contenue toute dans l’aspect qu’elle
revêtait en 1799, lorsque Stendhal quitta
Grenoble. L’homme d’esprit qu’en 1824
on cherchait à pénétrer est le résultat