Robert DELAUNAY
PEINTRE
J’ai connu Robert Delaunay un beau jour. Il faisait un temps magni
fique. Il faisait si beau que les maisons grises étaient ornées de fleurs
bleues, rouges, violettes.
Je fumais. Je vis un homme jeune, grand, s’approcher de moi et me
tendre la main. M. Robert Delaunay, bonjour.
J’ai revu Delaunay depuis cette époque. C’est un peintre âgé de trente-
cinq ans, sans doute. Il a les yeux bleus, les lèvres rouges et les mains
larges. Il fume volontiers la pipe et parle sans se gêner. Il est élégant
et ses chapeaux ne sont pas les chapeaux de tout le monde. Il se met
facilement en colère à propos de tout, du temps, de la pluie, du ciel, de
ses tableaux, des poèmes de ses amis, de son fils, de ses pinceaux. Mais
on le calme vite et il sait sourire. C’est à ce moment qu’il parle de ses
projets. Il a autant de projets que de souvenirs. « Un jour, dit-il, j’ai
vu une automobile toute rouge, mais demain je vais peindre un immense
—