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— C’est très fâcheux... eh bien, essayez de la mort-aux-
rats.
— Ah ! ouat...
— Ouat?
— J’ai presque honte de le dire, mais Monsieur ne sait
peut-être pas que la bonne mort-aux~rats venait d'Allemagne!
Us sont forts sur les poisons; dame, des gens qui ne pensent
qu’au mal! Ainsi ça fait que depuis Y amnistiée...
— Au diable!... prenez un chat!
Dominique Dalibert, irrité par ces petites misères domes
tiques, avait dit « prenez un chat! » Momentanément au-des
sous du castor, il n’avait pas pensé cette phrase avant de l’ar
ticuler. Et maintenant il s’épouvantait de l’entendre, comme
en écho. Une rougeur passagère colora la face de craie bar
bouillée. Un frisson courut sous la redingote.
Les petits grains de cassis roulèrent sur eux-mêmes. C’est
que Dominique Dalibert lisait clairement dans les yeux de la
servante, excédante mais si dévouée ! si intimement attachée à
son maître, qu’elle aussi était émue.
— Monsieur a dit... un chat?... J’ai bien compris que Mon
sieur me commande de me procurer un chat?...
— Eh! oui, un chat... pas un serpent à sonnettes, corne de
cerf!...
Cette fausse colère ne trompa point Phrosine. La malice
inscrite dans ses yeux et sur ses lèvres pouvait se traduire par :
<( Oui, plaisante! tiens des propos bien farces, mon pauvre
bonhomme de maître!... Tu ne parviendras pas à dissimuler
à ta servante, si vieille bête qu’elle soit, que tu es bouleversé
jusqu'au fond de l’âme. Et ça se comprend. Qui sait si la
Providence ne nous a pas envoyé les souris pour que tu aies
le désir d’un chat?... Tu as peur, à cause que la science te