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La poésie des fous ne m’intéresse pas en tant
que poésie, car je ne suis pas fou ; de même
que la musique des anges ne m’intéresse guère
davantage n’étant pas moi-même un ange.
Je suis un homme tout simplement, je suis
un poète, et ce qui m’intéresse, c’est la poésie
des poètes.
Maintenant, parce qu’il n’y a pas de poètes,
dans notre monde, nous allons chercher la
poésie ailleurs, dans le monde des fous, des
anges ou des somnambules.
Je réponds non. A mon avis, nous devons
tâcher de faire naître cette poésie qui n’a
jamais existé, de faire pousser dans notre
champ, pas dans celui du voisin ni à la planète
Mars, cette plante qui nous manque et que nous
cherchons plus que toute autre chose avec
angoisse et avidité.
L’imagination des fous est une imagination
absolument restreinte ; leur poésie est pauvre
et vraiment, si ce n’est pas par dilettantisme,
je ne comprends pas que l’on puisse la renchérir
comme certains le font actuellement.