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graphies abstraites s’applique aussi bien aux pein
tures qu’on pourrait dire mécaniques, aux cubistes et
autres, dont la dénomination importe peu, et serait
d’ailleurs fausse autant que celle que je souligne ici.
On aurait tort de croire que les périodes caractéri
sées par ces diverses peintures, totalement différen
tes, se sont enchaînées dans une progrssion continue
et insensible. Elles ont au contraire leur existence
propre et fermée. Elles peuvent coexister même quel
que temps en se compénétrant comme les noirs et les
blancs d’une partie d’échecs. Mais toujours, chacune
dans leur domaine, elles constituent un Univers nou
veau et distinct, en dehors des préoccupations plasti
ques, et cependant ce sont des oeuvres plastiques, d’un
charme plastique, qu’elles mettent en circulation.
La chose paraîtra toute naturelle si l’on considère
ses tableaux faits, comme disent les critiques d’art,
avec de vrais pinceaux, de vraies couleurs, sur de la
vraie toile, variations mi-expressionnistes, mi-impres-
sionnistes sur Paris ou sur New-York, par exemple,
et qui dissimulent une sorte d’humour extra-humain
suffisant à éclairer le vrai sens de l’œuvre. Mais où
le mystère se dévoile tour à tour de l’ombre et de la
lumière, avec le même charme que celui de ces pa
piers plissés et découpés qui dépliés donnent nais
sance à d’étonnantes fleurs japonaises à transforma
tion, c’est dans les dernières photographies abstraites,
qui devaient conduire tout naturellement aux images
en mouvement du film L’Etoile de Mer, dernier stade
de l'activité actuelle de Man Ray.
Man Ray a toujours songé à tuer la plastique... Meur
tre d’amour. Mais pour faire durer son plaisir plus
longtemps, il n'a cessé de lui refaire une virginité. A
fouiller dans le bric-à-brac des poètes et les lieux com
muns confiés à la teinturière des muses, on peut par-