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Humberto Rivas est sans doute moins savamment délicat que son
frère, mais il a plus de fraîcheur et la même naïveté :
A l’aube
quand la gelée, dans les rues, se met à sécher
les draps de la nuit
Lorsque le rêve ouvre les paupières
et secoue son tapis
au balcon du jour
A l’aube
que mes poèmes volent comme des graines
petits oiseaux engourdis qui prenez votre essor
humides encore de la torpeur du nid.
Il me faudrait citer encore en Espagne plusieurs poètes de très réelle
valeur, tels que Isaac del Vando-Villar, directeur de Tableros,
Gutierrez-Gili et tant d'autres.
Je ne voudrais toutefois pas clore ces quelques lignes — fort
incomplètes — sans dire un mot du poète chilien Vicente Huidobro.
Il ne fait pas partie du groupe ultraïste, mais son art, le créationnisme
s’est développé parallèlement, et a fait naître en Amérique une
tendance nouvelle, apparentée spirituellement à l’ultraïsme espagnol.
La traduction du poème : Chevelure de Huidobro, paru dans le
premier numéro de Tableros donnera une idée de cette poésie, et
permettra d’en apprécier les affinités avec les vers cités ci-dessus.
Il y a, dans tes cheveux légers,
Une musique sylvestre
Et la pluie nocturne
sous l’astre somnambule
Ta chevelure dort sur la campagne
Quelqu’un ne trouvera pas la route
Et au-delà de l’horizon, tombera dans le vide
Etoile native.
Cet oiseau dans mon cœur me fait mal
Et ma vie
à demi assoupie, est restée beaucoup en retard.
Au bord de l’après-midi
Une voix me parlait
Etre aveugle à midi
Je regardais
mon toit
douce mer de mes rêves
Et le collier de tes larmes
flétri sur ma gorge.
Vertige du vide
Chevelure fidèle de ma barque
Ces fils qui se lèvent aux confins
sont aussitôt trois cordes de violon.