LE MENDIANT
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Passant tu chercheras dans l’ombre cimmérienne
Mon fantôme pareil à la réalité
Mais le passeur aura voué mon corps aux chiennes
Mon spectre juste aux gueules du tricapité
Et me tenant au bord du fleuve sur qui volent
Les obscures migrations des oiseaux blancs
Je me lamenterai faute de ton obole
Au passage des riches comme moi tremblants
Sois-tu maudit rien n’est tombé dans ma sébile
Va-i’en vers le spectacle où des acteurs feront
Gémir les femmes grâce aux grimaces flébiles
Je n’ai que ma douleur pour émouvoir Charon
Et vivant je mendie de chaque aube à la brune
El je cesse ma plainte quand le jour s’éieinl
Je reviendrai demain avec mon infortune
Voir flamber l’aurore l’Electre du malin
GUILLAUME APOLLINAIRE.