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Les premières manifestations de l’art nouveau en Pologne
eurent lieu pendant la guerre. C’est l’an 1916 qu’il
faut considérer comme la première date fixant un effort
poétique vers l’art moderne. C’est au cours de cette année,
que Jerzy Jankowski a publié son livre de poèmes :
« 1 ram wpoprzek ulicy » (Une poutre à travers une rue »),
qui était orienté vers les tendances exprimées par le futu
risme italien. Presque en même temps les poètes groupés à
Poznan, ont commencé leur activité autour de « Zdroj »
(La source), une revue dirigée par Hulewicz. Les colla
borateurs de « Zdroj » étaient surtout sous l’influence de
l’expressionnisme allemand, qui se montra en définitive une
« source » trop tarie pour créer la poésie nouvelle. Il faut ici
rendre cette justice à certains collaborateurs de « Skaman-
der », (une revue issue de La jeunesse universitaire de
Varsovie et des sécessionnistes de « La Source ») qui
au commencement de leur activité s’efforçaient de chercher
des sentiers nouveaux et propres à
J
« Slopiewnie » de Tuwim et à la prose de Rytard.
C’est Cracovie, la ville ancienne et conservatrice, qui
prit l’initiative de la création d’une poésie franche
ment nouvelle. C’est ici, que les artistes, qui se disaient
formistes et futuristes, commencèrent à se grouper et à agii.
Varsovie et Wilno repondirent bientôt au signal donné pai
Cracovie. On publie des livres de poèmes, et de re
vues éphémères, on agit par des conférences et la
récitation de poésies- Il faut citer ici la revue «Formiści»
( « Les Formistes » ) fondée en 1917 à Cracovie par T.
Czyżewski. Les plus connues de cette phase du mouvement
vers l’art moderne furent deux feuilles (manifestes) du
futurisme polonais, qui parurent en 1920 et 1921 à Cra
covie et à Varsovie sous des titres étranges pour le public.
Elles
ont
propage
d’urïe
manière
extrêmement
radicale les idées empruntées au futurisme italien et russe,
auxquelles
on
ajouta quelques-unes
propres
aux
artistes polonais. Ces jeunes littérateurs voulaient aussi
réformer le domaine de l’ortographe polonaise en
remplaçant l’ortographe traditionnelle par celle basée sur la
prononciation. Cette ortographe malheureuse a créé entre
ses propagateurs et le public un abîme, qui même aujour
d’hui n’a pu être comblé. Il faut signaler le fait
assez intéressant que la différence entre les formistes et les
futuristes était assez illusoire. En réalité on pourrait dire
que ceux qui s’occupaient de la peinture en même temps
se disaient formistes, pendant que les autres se rapprochaient
plutôt du futurisme. Il faut ici citer les noms suivants: :
Br. Jasieński, A- Stern, A. Wat, St. Młodożeniec, T.
Czyżewski, et comme peintres et théoriciens : L. Chwistek,
Z. Winkler, et St. I. Witkiewicz. A côté du futurisme et du
formisme ce furent les démonstrations dadaïstes à Varsovie
(A. Stern et A. Wat : «GGA ») et à Cracovie (les néga
tivités : J. E. Dutkiewicz, J. Brzekowski, J. Przyboś et
J. A. Szczepański).
C’est la « Zwrotnica » fondée en 1922 à Cracovie, qui
a réuni itous les artistes modernes. Dans l’activité de la
« Zwrotnica » il faut distinguer 2 époques :
La première (1922-1923 — fut remarquable surtout
par la coordination de l’action des futuristes et des for
mates et par les articles théoriques de Tadeusz Peiper,
directeur de la « Zwrotnica ». Dans un article éminent
« La ville, la foule, la machine » il éclaira le rapport
des artistes avec l’essence nouvelle, créée par la vie et par
la civilisation moderne dans « La métaphore de mainte
nant », il a fait remarquer une des plus essentielles
conquêtes de la poésie nouvelle : le rafraîchissement de la
métaphore. Le dernier numéro de la première série de la
revue était destiné à préciser sa position envers le futurisme
russe et italien.
Les collaborateurs les plus connus de cette période furent
Bruno Jasieński, Anatol Stern, Tytus Czyżewski, Stanisław
Młodożeniec et Juljan Przyboś.
Après une interruption de deux ans, pendant laquelle on
ne continua l’activité que par les livres, la deuxième
série de la « Zwrotnica » parut. Sa base théorique
fut le livre de Thadée Peiper : « La bouche nou
velle » et les articles de Peiper et de Przyboś. Le livre de
Peiper ne prescrit pas canons et règles à la poésie, mais
il corrige certains préjugés et faussetés très répandus. Peiper
oppose la phrase aux « mots en liberté » de Marinetti en
précisant la poésie comme « l’art de former de belles
phrases ». La différence entre la poésie et la prose est
d’après Peiper, que « la prose nomme (directement),
pendant que la poésie ne fait que pseudonymer », c’est-à-
dire nommer les choses par leurs symboles plus éloignés.
C’est la pudeur des sentiments, dont Peiper fait la propa
gande aussi en combattant l’exhibitionnisme poétique.
Les poètes de la « Zwrotnica » travaillent en acceptant
certains règles de constructionnisme poétique. Chacun à
part et tous ensemble ils essayent de trouver les lois
nouvelles des associations des images et les rapports inexploi
tés entre les mots en condamnant pourtant l’association
nisme pur. Przyboś a poussé ses recherches jusqu’à la
création d’un langage spécial et propre à lui, Peiper a
écrit quelques poèmes en les conformant au « système de