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Déjà
Quelqu’un s’en va
Pour survivre à la nuit
L’oiseau vibre comme un réveil
Dans le rideau
Rayon emprisonné
La guêpe a quitté son corset
La dame a mis ses bracelets
La baignoire est pleine
La Mer PIERRE REVERDY
UNE NUIT DANS LA PLAINE
Je descendis de la colline où le soleil joue dans les glaces du phare.
La nuit, derrière la porte où l’on avait rassemblé les races les
plus différentes quelqu’un parlait encore, en rougissant.
L’exposition de 1900 était depuis longtemps finie. Maintenant on
abattait les animaux autrefois exposés. Le succès n’en était pas moins
grand.
Ici on se recueillait, dans le calme, à l’abri du danger qui menaçait
partout ailleurs les autres hommes qui pouvaient compter pour un
moment, puis jamais plus.
On riait même et l’on pensait tout le mai que l’on n’osait pas dire
de son voisin.
Quelques fleurs avaient roulé en s’effeuillant sur le bord de la
table.
*
* *
Après le premier service on apporta les viandes et l’Indien s’abstint
chastement de peur de renouveler son crime et de dévoiler à tous son
origine. Un anthropoïde honteux qui était là n’aurait pas voulu man
ger son frère, présenté sous un autre nom.
Au bout de la table un vieil abbé en habit démodé s’abstint aussi.