Paris—Apparition du Nord—Sud, revue, dirigé par Pierre Reverdy.—Disparition de Picasso, à Rome où il
va organiser un ballet Russe—querelles de poètes, poètes de querelles.—M. Ribera giffle Reverdy a une
dîner offert chez Lapeyrouse par M. Rosenberg à ses pensionnaires.—On parle de la mort de Markouss.—
Kisling intente un procès à l’infortuné Basler pour diffamation.—Apparition prochaine des poèmes en prose
de Max Jacob.—Apparition d’une nouveau livre de vers d’Apollinaire.—Naissance d’un poète roumain Tris
tan Tsara qui écrit dans ce style Tsara! Tsara! Tsara! Tsara! Tsara . . . Thoustra.—Paul Guillaume
prend une place énorme; les tripes de Paul Guillaume . . . Apollinaire. Débarquement d’une famille russe
qui fait souper des peintres qui n’ont pas diné.—Naissance de la grande sculpture cubiste par la main du
polonais Lespsiche.—Madame Derain à la Rotonde Reverdy! Reverdy! Reverdy!—Serge Jaztrebsoff, son
partisan, vit seul dans un appartement pareil à M édrano.
Max Jacob.
Barcelone—A ses pieds, la mer, énorme de santé bleue et d’ingénuité pure. A son chef, Montjuich et un
fantôme. Et, grouillant par tout son corps de vieille tata qui se sucre la gaufre, des hommes. Des hommes
qui, pas plus ici qu’à New York, Paris, Pétrograd, Londres, Pékin, ailleurs ne sont beaux à regarder ni bons
à sentir. Parmi cela, quelques artistes. Ils comptent si peu dans le temps, que M. Saglio, traversant Barce
lone, les aperçoit à peine. Mais ils importent tant dans l’espace que le voyageur attardé sur la plage n’aper
çoit bientôt plus qu’eux: plus hauts que le Tibidabo; plus lumineux que les illuminations désormais
dérisoires—du Férocarril Catalan plus suaves que les odeurs célèbres qu’une administration moins dépour
vue de “vigilants” que de vigilance laisse flotter parmi ces ruelles et ces paseos que les naturels du terroir
comparent—calmement et tour à tour—aux voies romaines et aux avenues de Chicago. Comme toute ville
de mauvaise vie, Barcelone, est pleine de morpions et d’intellectuels, les intellectuels d’ici sont à sang froid,
ils préfèrent au viol l’onanisme; au bain, la crasse; à l’affirmation périlleuse, le jeu subtil des insinuations
contradictoires. Ils sont à la fois—disent-ils—philosophes, poètes et politiciens; leur passe temps favori
consiste à se donner beaucoup de mal pour différencier, en ce qui touche une même personne, fait, ou idée,
l’opinion de leurs trois composés. Il est donc toute à fait normal que ce monsieur qui, sans sollicitation
aucune de votre part, vient vous accorder toute sympathie en tant que philosophe, vous plante entre les
épaules le poignard du politicien. Il n’y a là qu’apparence de contradiction et logique profonde.
Pharamousse.
H. CARO DELVA1LLE
(Artiste peintre) vient de ter
miner une comédie de salon
(comme sa peinture) en colla
boration avec Mme. G. Dorziat.
Nous pensons qu’il sera donné
aux parisiens d’applaudir bien
tôt ce bijou artistiquement
cicelé.
MARCEL DUCHAMP
Professeur de langue française
à Washington Square Univer-
sity a donné sa dimission de
membre du comité des Indé-
pendents.
M. DE ZAYAS
Que la fumisterie des gens
avides de réclame facile tel le
chien d’Alcibiade s’est fait
couper un doigt le peintre R.
Frost s’est fait couper la queue,
met dans tous ses états. S’est
confiné en Modem Gallery, où
il se console en comparant les
dessins d’Ingres à ceux de Pi
casso.
MME. V. DE ST. POINT
Souhaitant de retrouver un lieu
aussi propice que Tossa pour la
vie de Camping, se prépare a
aller planter ses tentes dans
l’ouest.
A. CR AV AN
Sa délicieuse causerie aux in
dépendants ayant été inter
rompue par un cas de force
majeure, le brillant confé
rencier se propose de la ter
miner a Sing-Sing le rendez-
vous estival du New York qui
s’amuse.
HENRI BERGSON
L’académicien bien connu venu
ici en mission de propagande
vit enfermé dans un diploma
tique silence.
ALBERT GLEIZES
Les magasins de la 5 e Avenue
ferment avant l’heure regla-
mentaire depuis que le cubiste
Albert Gleizes s’y promène
pour y prendre des croquis.
Les patrons croyant d’abord
avoir à faire à quelque plagiaire
de leurs modèles, puis après
connaissance des dits croquis
à quelque fou dangereux, pré
férèrent recourir à cette mesure
de prudence.
HACHEPÉ
S’est développé comme les
fleurs éclosent au cinéma. Il
déclaré qu’il est impossible de
dejeuner ou diner avec Mon
sieur et Madame Picabia reunis.
FRANCIS PICABIA
De retour en Amérique déclare
que les seuls poètes qui ont
jamais existé sont Guillaume
Apollinaire et Max Jacob.
MME. J. R.
S’omeopathise au Whisky sous
la surveillance de Monsieur A.
Gleizes de plus en plus déprimé
par la tournure que prennent
les événements.
MME. DUNCAN
Que nous n’avons jamais admi
rée, a certainement autant vieilli
que les dessins de Rodin et de
Segonzac.
LEO STEIN
Comme le poisson cubain il se
gonfle quand on le chatouille.
391—NUMERO 5—PRIX 50 CENTS—New York, Juin, 1917