46 LES PORTES QUI MORDENT (fragments) par TRISTAN TZARA j’ai laissé le corps qui sous le vent se dévêt à l’intérieur des douves déjà mal ajusté bien pauvre crépitement d e cerise se lézarder le long des soupentes et des agricultures crayeuses de glace d’ardoise de raideur mal servile et proverbiale des ruches montagnardes où les fruits vont vibrer à la soif de pouvoir j’ai voulu endormir les questions insidieuses sans poids telles les tombes à chaque dire avançant les pointes branchues froidement poissonneuses et glissantes les venins et leurs trajectoires soupçonnées à peine dégrossies et pourtant hagardes craintes les ten tacules pourtant dangereuses de tant de sangliers de tant de projets que la glace se cassait et fondait sous les rapides remous des bêtes laineu ses les trains et les forêts lourdes chargées de cargaisons fluviales j’ai senti le sommeil ordonné rayonnant en pleine glissade matinale un beau linge rangé sur le sommet de framboise ou les bouts de seins des femmes aimées par les neiges amoncelées au long cahotant d’une mémoire en cours j’ai allumé le feu immobile du désert et si je me sentais vivre ce n’est qu’en lettres ravies aux sources des ramures de cerfs aucun souvenir aux cheveux hérissés de mica n’est venu incruster sa fine fusée sur le beau corps d’enfant au rire de mer qui s’est entortillé à tout jamais dans ma solitude de fil vivants glaçons charriés à oras d’homme l’immémoriale douleur grandie sur les préaux de soufre les cris aiguisés sur la meule des louves les cœurs saccadés sur le brasier d’os de ravins les tendresses saccagées les tampons des trains les chocs marins amor tis dans la braise ce sont des craquelures nouvellement avouées par des tisanes de ciel qui s’offrent aux secrets des fumées parmi les miasmes des bateaux désarmés à peine enlevés au soleil les cadavres se rongent les brandons et en guise d’écume la mer balaie de la chapelure de charbon de bois