— 15 — Valentine. — Regarde moi et je croirai aux tristesses de chaque oui, aux réveils pénibles comme le sable. Paul. — J’ai le droit de te mentir. Valentine. — J’ai vu dans chaque reflet mon image et j’ai peur de ne pas te croire. Tu mens ? Et je veux que tu me dises non. Paul. — A quoi bon ! Tu sais bien qu’il faut que tu souffres. Un jour, une heure, comme un arbre isolé dans la campagne de ton enfance, vaut bien tous ces mois lointains qui ne sont que demain. Le doute s’appuie doucement sur toi et tu l’aban donneras comme une ingrate. Valentine. — Je vais retrouver l’air et le froid et je saurai enfin que tu n’es plus là. Paul. — Je ne suis sincère que quand je puis te mentir. Les paroles que tu aimes, je les sais par cœur. Valentine. — Parle, je t’en supplie. Chaque silence dévore nos minutes. Mon cœur bat comme à l’arrivée des trains. Je suis la route de mes rêves. Le but est tout proche. Nous n’al lons pas tarder à nous séparer et le sommeil s’étend autour de nous. Paul. — Ecoute... Valentine. —Tu souris... Paul. — Mon sourire, je ne puis le fuir. 11 s’impose à mo comme un songe. Valentine. — Est-ce que nous savons pourquoi je souffre ? Je ne sais même pourquoi je tremble. J’ai peur. Tu m’écoutes ? Paul, sec. — Oui, parfaitement. Valentine. — Je voulais te dire... Paul, même jeu. — Quoi ? Valentine. — Tu sais. Pourras-tu souvent venir nous voir? Paul, même jeu. — Je ne sais pas. Nous verrons. Valentine. — Je voudrais te quitter tout de suite et ne plus entendre tes paroles qui tombent lourdement sur moi. Le bruit de tes pas me fait mal. Paul. — Tu es si loin - ! Valentine. — Je suis près de toi comme la terre. Paul. — Il faut s’éloigner et ne pas regarder derrière soi. Il s’agit de bien autre chose. La tendresse ne nous appartient pas : c’est ce vague brouillard qui ne suffit pas à cacher le sang qui coule dans nos veines et la souffrance de nos mains.