78 MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX bien. J’occupais une place de choix, au pied de la tribune disposée pour les orateurs et ne me permettais point d’omettre une seule occasion d’applaudir. Je ne me croyais pas, hélas ! si près d’un désastre irrépa rable. « Voilà, en effet, qu’au moment où je m’y attendais le moins, un homme, ou plutôt un monstre, une espèce d’énergu- mène sans pudeur et sans retenue, fit un bond sauvage, arriva jusqu’à la tribune, et fit le geste de frapper le personnage même dont j’écoutais les paroles avec un geste d’approbation respectueuse. Je ne sais ce qui se passa en moi. Est-ce l’indi gnation qui me poussa ? Je pense plutôt que ce fut un besoin irraisonné d’activité. J’ouvris les bras, et l’énergumène tomba dedans. « Je vous donne ma parole d’honneur que je ne l’avais pas fait exprès. Mais un instant plus tard,j’étais célèbre...et perdu! On m’entourait, on me félicitait, on me ra