BIROU 189 rière mon entraîneur. Si vous ignorez cette joie pure, je vous plains : quelques secondes suffisent pour vous faire perdre le sentiment de votre propre personnalité. C’est un phénomène d’hypnose : on ne voit plus au monde que cette petite roue d’acier qui tourne devant vous. Ne pas perdre sa distance, maintenir ses jarrets dans le rythme, dans l’harmonie mobile des jar rets qui vous précèdent, devient le souci unique, la raison d’être de toute votre exis tence ; la route est silencieuse et cepen dant il semble que de ce ruban d’un blanc jaunâtre, où la vitesse fait apparaître de petites stries longitudinales, il s’exhale un chant fort et singulier, j’aurais envie d’écrire un chant silencieux, qui retentit dans la cervelle, et la ravit. Cela dure plus ou moins longtemps, selon votre état de fatigue et la vitesse que vous impose celui qui vous « tire » — un petit quart d’heure en général ; après quoi on retrouve son indépendance d’esprit, on redevient libre