I i 2 Le passage de Picabia chez les flamencas de Séville nous permet d’admirer aujourd’hui ces belles têtes d’espa gnoles réunies à la Galerie de la Cible. Figures graves dont l’accent de vérité contraste si heureusement avec l’air canaille par lequel tant de peintres ont faussé le caractère de l’Anda- louse. Mais ceux-là n’ont pas connu l’Espagne, ils n’ont rien pénétré de sa noblesse ni de sa fierté et c’est de l’enfant du pays qu’il fallait attendre cette révélation. Pourrons-nous un jour rassembler également pour le public tous les dessins exécutés en Italie par Francis Picabia? Espérons-le. Sous le ciel plus doux de l’Ile-de-France, au sein de la fine atmosphère d’un pays où le brouillard et la pluie jettent dans le plein air de délicieuses sensibilités, Picabia se montre d’une puissance aussi soutenue avec une lumière pareillement sincère et vraie que devant l’éclat sonore du Midi. L’oeil du peintre se retrouve en effet aussi juste sous les soleils mouillés d’avril que devant le canal des Mar tigues. L’Amérique tenta Picabia comme tous les peintres qui cherchent et qui pensent à la progression de l’œuvre dans la diversité de forme et de milieu. Et il eut, là-bas, le succès artistique et commercial donné si largement déjà par les amateurs français. J’emploie ce rude mot de commercial parce qu’il est juste, normal, et qu’à un tournant de la carrière il arrive avec la force du facteur le plus solide à son développement artistique. Plût à Dieu que le million dont fut payé l’Angélus eût été donné à Millet et non pas aux sous-traitants de son génie! La peinture que Francis Picabia exposa en Amérique