DRIEU LA ROCHELLE 295 Toute sa nonchalance était pour nous, nous sentions qu’il retenait son élan. Il s’enchantait de ce corps gracieux, qui, sous nos yeux, inventait de nouveaux signes de la tendresse. Gonzague enviait le contentement de Guy, mais en méprisait la cause. — Ce n’est pas une femme comme j’en aurai, comme il n’y en a pas. Et puis, il la paye. J’appris que Guy avait fait un héritage. Il s’était associé à un mar chand d’autos, il travaillait. — Non, Guy, tu gagnes de l’argent? — J’ai fait un mois de dix mille. Le vieux croyait m’avoir au début, mais je l’ai secoué. — Et voilà, ajouta Gonzague, ce grand idiot entretient cette donzelle ! — J’adore ça, c’est ce qui me plaît le plus dans notre ménage, ré pliqua La Marche. Ses épaules s’étaient carrées. Nous revenions vers Paris. Us marchaient devant Gonzague et moi, en s’embrassant. Gonzague grognait. — Quel idiot! Une petite grue. Carrière négligée. Moi j’essayais de rattraper Guy et de repasser par le fil de sa vie. « Voyons, le Paltoquet, Jim Fizz d’un côté, Peau de l’autre. Com ment relier ces épisodes. Un court voyage d’aller et retour dans un pays qui ne lui a pas plu, où il est allé parce que c’était la mode. Il a vingt- quatre ans. Il est rentré, n’en parlons plus. » Drieu La Rochelle.