324 FAITES VOS JEUX la juste indifférence d’un ami pourtant intéressé, et au fond très curieux. Mania me dit que la liaison entre elle et T. B... était due à sa maladie. T. B... aurait profité d’une de ses crises, pendant qu’ils étaient chez nous à la campagne. J’avais raison de me méfier. Elle m’assurait qu’elle le détestait. Au cours de ses crises, j’apprenais des détails qui me stupé fiaient. Et c’est ainsi qu’elle réussit à troubler mon jugement. Je me forçais à ne pas réagir ouvertement devant mes émotions et à charger de ménagements les affirmations de ma personnalité. Un voile dense m’enveloppait déjà et toutes mes sensations rico chaient à l’intérieur de moi-même, établissant des couches chronolo giques de sentiments comme les ères successives de l’histoire de la terre ont laissé des traces impérissables dans le sol. LA TÊTE TENTACULAIRE XIII. — Ou la voluptueuse habileté des vignes et le mensonge. Sous l’ombre lente, les pierres vivent d’un reflet familial et l’expres sion que prennent leurs contusions s’enchaîne au sourire des plages, aux indolences de la blancheur. Sous l’ombre lente, les amis se disent les plaisirs qui sonnent dans le porte-monnaie du cœur, là où les fines expériences lèchent les avan tages d’une stupide animalité dans un port accueillant. Sous l’ombre lente, on déjeune de fraîcheur, on saute de ville en ville avec les nouvelles des journaux, à chaque histoire on plonge dans un vin imaginaire, et parmi les perçantes annonces de la chair qui revient, on est sûr de discerner la plus ample et adéquate forme de satisfaction. Sous l’ombre lente, je regarde la vigne et son fruit d’ombre lente. La vigne s’allonge et rampe, ses doubles tentacules implantent leurs ongles dans le bois frais de l’arbre, font un nœud, se rencontrent avec d’autres tentacules et se lient à la branche. D’autres mains sont envoyées dans la même direction. Le vent soufflant dans les voiles déployées des feuilles, les aide souvent à trouver dans leurs tâtonnements, la branche