300 PASCAL PI A LA PEINTURE CREIXAMS. La grâce et la candeur de ce visage incliné, ces lignes souples comme d’une main cependant malhabile, sans doute un primitif les eût aimées. Et près du ciel faux de ces yeux, près de cette bouche san guine, serrée, il eût reconnu l’image précise qu’avait manquée son pinceau. Car c'est aux primitifs qu’il faut qu’on remonte pour trouver à Creixams des précurseurs. Chaque toile qu'il peint nous est une surprise, un bonheur compliqué d’étonnement. D'autres peintres ont pu découvrir par une spéculation audacieuse le secret d’un art depuis longtemps perdu; mais Creixams, primaire qu’il est, n’a fait œuvre que naïve, que spontanée. Ce n’est ni chez Giotto, ni chez Cranach qu’il a compris les jeux du trait et de la lumière. Il est même certain qu'il n'a eu vent de la peinture ancienne qu'après l’avoir tout naturel lement évoquée. Mais vers le Giotto commençant d’inscrire ses brebis sur la pierre, du bout d’un caillou pointu, Cimabue s'est affectueuse ment penché. Or Creixams n’a pas connu cette bonne fortune dont bénéficiait Giotto: un maître attentif... A Jaen comme à Cordoue l’art n'est qu'un souvenir arabe. A Barcelone où la terre est plus pauvre et