92 FAITES VOS JEUX Au début d’octobre dernier, enfin, elle se commande une robe noire et se procure un revolver. Sa décision semble être prise. Le 4 octobre, dans I*après-midi, elle enfourche soudain sa bicyclette et part pour le Havre. Une résolution fébrile l’anime... A six heures, lorsque Cottard sortit de son atelier de cordonnerie, une joyeuse surprise l’attendait : Germaine-Louise stationnait, souriante, au milieu de la rue et 'l’accueillit avec affection. — Tu vois, je suis venue te surprendre! On décida, toutefois, de ne pas rentrer sur-le-champ à Octeville. La soirée était douce encore. On s’assit au restaurant, on commanda à dîner. Le cordonnier, repris, lui aussi, par l’espérance d’une vie conjugale meilleure, s’attendrissait, maladroitement ému. En se levant de table, on s’arrêta encore au café voisin, de sorte que c’est « le cœur bien à l’aise » que l’on se remit en route, vers neuf heures, pédalant sans hâte côte à côte... Soudain, entre Bléville et Octeville, Germaine-Louise ralentit, des cendit de machine. — Attends-moi donc un instant, dit-elle. Elle s’éloigna, descendant dans l’ombre du talus. Lui resta sur la route, nettement profilé, en silhouette, tenant les deux bicyclettes. Alors, inattendus, effrayants dans le silence contourné d’oiseaux timides, trois coups de feu retentirent, montant de l’obscurité. Cottard s’affaissa, jetant un cri. Quelques instants plus tard, Germaine-Louise apparaissait, toute tremblante, au petit hameau de Sanvic, frappait à la première porte venue, puis avertissait la gendarmerie : — Au secours! au secours! on vient de nous attaquer... des inconnus qui se sont enfuis dans la nuit! Les braves gens ainsi rassemblés s’armèrent au hasard et accoururent sur les lieux de l’agression. On trouva les dteux machines tombées sur la route. On attendit, on appela... Rien ne répondit.