102 NERON la chaire, et ronflait sur le divin Virgile. Son premier crime : il attrapa une souris sous la mappemonde, et cassa les reins à Atlas. Il ne riait jamais, parmi ses babines hilares. Vers cette époque, son poil devint héroïque, prit des teintes Alsace-Lorraine. Et il installa une trompette au bout de sa queue. III LA BICHE Ça biche! Ça biche! Elle avait les oreilles ogivales et les pis noirs. J’avais seize ans, elle deux. Je passais mes vacances au château du grand-duc. Elle habitait l’étable. L’œil humide, la patte dure, elle venait vers moi en bramant. Elle sentait le sucre, la carotte et le bouc. Je lisais Suétone et Brantôme. Ce mélange gallo-romain me cha touillait les narines. Néron enchanta ma puberté. Néron : la Ville brûle au son des flûtes en pleurs dans un firmament plein de courtisanes et de légions. J’embrassais la biche sur sa barbiche. Tout en bêlant, elle posait des crottes ovales sur la prairie. Et l’épagneul, gaiement, lui mordait les gigots. Je rejoignais ma maîtresse dans une grange tendue d’araignées et de chauve-souris. Elle avait une lune dans les cheveux et l’Histoire Romaine à la main. Nous formions dans le clair-obscur des projets si mélancoliques ! Je lui parlais de Bonaparte et de mon cœur. Je posais mon oreille à la serrure de son nombril. Je disséquais des grenouilles sur son ventre. Nous cherchions Néron dans le foin.