PHILIPPE SOUPAULT 175 tude de questionner. Lorsqu’il était inquiet, c’est en lui-même qu’il cher chait une réponse. Ce fut une période féconde. Je distingue La Ville de Paris (1912) * Les Fenêtres (1912). Delaunay expose à Paris. Rien ne le décourage plus, il continue. Equipe de Cardiff (1913). Et dans les rues, dans les bals, il rit de toutes ses dents. Il n’a plus peur d’être gai. Ses vêtements font l’admiration de sa concierge et de l’antiquitaire du coin parce qu’il les a choisis de toutes les couleurs. Il s’amuse parce qu’il sait qu’il faut avoir confiance. Hommage à Blériot (1914). Crime politique (1914). Mais ce qu’il voulait encore c’était le soleil. L’Espagne s’offrait à lui. Il y resta six ans. Il y découvrit la sensualité. (Nu, 1913. Natures mortes. Femmes aux potirons, 1916-1917.) Il voulut aussi retrouver ses souvenirs. (La Tour, 1918-1919.) Les dates ne sont rien que des chiffres, que des épingles pour les souvenirs papillons, épingles qui font mourir lentement. Un rayon de soleil qui est né à Madrid, une chair qui est un muscle vivant, une gorgée d’eau qui est un fruit, souvenirs miroitants comme l’eau ne demeu rent que parce qu’ils vivent dans les yeux, dans la poitrine ou dans la gorge. En revenant à Paris, Delaunay ne reconnut plus son ombre. Tout était changé. Les amis morts avaient emporté une partie de sa vie et ceux qu’ils retrouvaient avaient oublié leur propre existence. Ils se pétrifiaient. Philippe SOUPAULT.