416 W. MAYR (comme si c'était la première fois), bref d'observer le remue-ménage qui s'opère dans la batterie de la cuisine délectable des sons. L'œil est un tel tyran, son hégémonie sur le cerveau est si assurée, que le ridicule de ces exhibitions musicales n’apparaît guère. Il tient à assister à un festin où il n’a que faire, et il prétend s’assurer que l'au teur d'une héroïque et fracassante glissade est bien ce gros trom bone aux joues empourprées, et qu'un rossignol loge dans cette bonne dame corsetée et palpitant comme un soufflet. L'oreille, bonne fille, se contente d’une collaboration plus lâche : je crois même qu’elle supporterait, en guise d'accompagnement d’un (film, les roulements variés qu'un artiste tambour exécuterait sur la caisse claire. Donnez-lui donc indifféremment du Saint-Saëns, du Beethoven du Wagner ou du Berlioz, des ras et des fias alternant avec des flon flons. Tout lui sera bon, pourvu qu'un peu de rythme s’allie au sautil lement des images. Mais ce rythme, objecterez-vous encore, contredit souvent celui qui se mime sur la toile, en dépit du zèle déployé par le chef d'orchestre qui attaque une marche pour scander un défilé officiel et qui donne la parole à l'harmonium seul pour les inaugurations de monuments funè bres. Encore une fois, cette discordance importe peu, quand Fœil est captivé et que l'attention visuelle est seule en jeu. Dans les scènes tristes, que se produit-il ? L’émotion, qui tend à déborder la sensation cérébrale, exige alors un accompagnement qui soit à l’unisson. La vue se soumet à l'ouïe. Les nerfs du grand sympathique entrent alors en danse sous la double excitation de l’œil et de l’oreille. Leur complicité nous font rire ou pleurer. W. MAYR.