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MAX JACOB
de Charles. On connaît les titres des ouvrages de Julie Durand : Aglaé
ou le Devoir Difficile, Armand ou le Jeune Précepteur. Et Charles
avait dans sa noble cousine une digne ancêtre : quoi d’étonnant qu’il ait
donné dès son enfance des espérances si remarquables?
Charles savait à peu près lire à huit ans et se tint toujours à la moitié
de sa classe au lycée. A chaque distribution des prix, il eut presque
chaque année ceux de Bonne Tenue et de Récitation classique. Ainsi il
montrait dès l’enfance cet amour de la Poésie que manifesta plus tard la
composition de sa Bibliothèque. (Cf. La Bibliothèque de Ch. Durand,
éd. Hachette, 215 pages, in-18.) Reçu bachelier non sans peine comme
tous les grands cerveaux qui s’adaptent si mal aux nécessités trop étroites
des examens (Ah! quand réformera-t-on le baccalauréat!!) Charles
entreprend l’austère étude du droit : il est remarqué pour la correction
de sa tenue par un avocat qui en fait son secrétaire. Malheureusement
les grands génies savent mal se plier à la discipline : l’avocat se sépare
de Charles sous prétexte qu’il ne sait pas même l’orthographe (?!)
L’orthographe! Ah! Charles avait bien autre chose en tête! Le grand
art lui avait été révélé par son cousin Durand Xavier, qui devait devenir
fameux par l’exploitation des statues Dupont (Entreprise funéraire des
monuments de square) et qui lui fournit l’idée de l’ouvrage qui devait
illustrer sa vie « La Compilation des Compilations ».
C’était en 18..., Charles venait d’hériter de trois mille francs de rente
et de conquérir son grade de licencié en droit après dix années d’études
acharnées. Quand il eut terminé ce qu’on appelait alors le volontariat ou
service militaire d’un an, il se décida à se marier. Son choix se porta sur
sa propre cousine, Eugénie Durand, qui, à notre époque d’excentricités
et d’individualisme outrancier, avait au moins le rare mérite de ressem
bler à tout le monde. Eugénie éleva ses deux enfants en les confiant aux
admirables professeurs de nos lycées et collèges, ce qui est parfaitement
sage, et reçut les amis de son mari dans son modeste foyer avec simpli