228 LE THEATRE Et ce jour là, à je ne sais plus quel conseil de réforme parisien, l'âme russe se vérifia une fois de plus impénétrable. Tout en gros, on semble n'avoir jamais fait d'autre effort pour la pénétrer mieux. Tchaïkowsky, Bakst, Rimsky-Korsakow sont pour la plupart d'entre nous de bien bons machins à distraction que nous pur geons, de sang-froid ou même sans nous en douter, de ce qu'ils ont de plus russe pour n'avoir pas à le fendre, le goûter et connaître que çà s’écarte de notre registre, de notre canon, de notre menu. Une édition russe de Gorki ou de Tolstoï n'a jamais dû être commode à trouver ici, hors des messagers en librairie qui heureusement font aussi la came lote anglaise et l’allemande. Le dernier marchand de Lacets-et-Pastilles du Sérail ne peut ouvrir boutique, serait-ce à St-Ouen, sans une magni fique enseigne en...Y' S ou en...AN'S, et personne, aux effectifs des classes maternelles n'ignore ce que veut dire groggy ou bath soap. Par contre peu de gens ont le calme de regarder une page de B'BCH ou des CTAPME rOÆH sans lui mettre aussitôt la tête en bas, parce que ** c'est écrit à l'envers " à moins que ce ne soit... mais qu'est-ce que c'est donc bien ? Et le reste à l’avenant. Car nous ne sommes pas précisément cette “population remarquablement instruite " que signale Claude Augé en Europe. Or, des graphismes de Cyrille à l'âme slave, l'accord s'est établi grosso modo que tout en Sainte-Russie a la tête en bas et s'avère donc impénétrable. De là à n'aimer point ou simplement ignorer des gens aussi malencontreusement plantés, il n'y a pas loin. André Salmon et René Saunier qu'émeuvent sans doute le vieux tragisme naïf et violent de Rœrich et l'angoissant mysticisme de Vroubel tentent de nous secouer et de nous tirer de là. « L'âme russe est-elle impénétrable ? Ce qui s'ac- « complit aujourd'hui au pays de Tolstoï et de Dostoïewsky vaut qu'on « ne se contente plus d'une formule agréable aux esprits paresseux. « L'âme russe mérite d’être pénétrée... » Et voici qu’ils nous donnent NATCHALO pour rendre les sentiments russes, la passion slave intelli gibles à l'esprit français. Certes le bolchevisme était un excellent pré texte de théâtre. Ils ont d'ailleurs su ne le prendre qu’ainsi pour faire réagir sous nos yeux ces caractères moins complexes qu’éloignés et bru meux, se déclanchant tout au long, sans calcul, sans adresse, jusqu’aux limites d’idées simples, directes, primitives. Qu'un Pitoëff, par exemple,