LA LYROSOPHIE 39 La lyrosophie double la vérité scientifique d’une vérité de senti ment. La science ne connaît de la vérité qu’une sorte de besoin et d’appé tit; la certitude du sentiment est seule satisfaisante. A l’apogée de son existence une vérité, est toujours à la fois raison et sentiment ; ainsi la terre, centre du système solaire. La vérité raisonnable de cette représen tation fut tranchée sans retour, au moment même où la démonstration scientifique de la rotation fut énoncée. Alors il apparut combien une vérité de sentiment est davantage sûre, chère, indépendante des contin gences et vivace. Car, à force d’usages, la terre considérée comme centre du monde avait acquis valeur affective comme en témoignaient mytholo- gies, religions et langages. Ce sentiment, se sentant supérieur à la science, plus véritable qu’elle, lui fit en cour de Rome un procès qu’il gagna. Fanatisme, dites-vous. Je n’y vois que bien de l’amour. Je n’y vois qu’un exemple, comme il y en a mille autres, d’une survie sentimentale quand la science, dont les floraisons brusques sont éphémères, passe la main. Je n’y vois qu’un exemple, comme il y en a mille autres, d’une notion lyrosophique analysée dans le temps, réduite à l’un de ses éléments par le défaut de l’autre. La lyrosophie conquiert la science au profit de l’esthétique, l’ordre au profit de l’amour. L’esthétique est fort dépréciée. J’en connais qui en bannissent jusqu’au nom. De fait, l’esthétique a été compromise chaque fois que quelque chose pouvait être compromis, ce qui fait bien souvent. On en a parlé tantôt comme de la pyrogravure, tantôt comme de la Communion des Saints. Taine a fait une triste dissertation sur la petite industrie dite d’art. Il a parlé de tout ce qui dans l’art, n’est pas de l’art, mais de la mise en scène et de l’accessoire. Tout le monde a composé son petit morceau d’esthétique. Chaque poète de Montmartre ou de Montparnasse en parle comme d’un ouvrage pour dames, et chaque poète de l’Académie comme d’une visite à sa mère grand. Le West-End Tailor, le tapissier décorateur, l’orthopédiste et le bottier détiennent chacun leur esthétique. Or, il s’est produit la seule découverte qui put mettre fin à ce gâchis. On a présentement situé l’esthétique en psycho