323 Lettre ouverte. Cher Monsieur, Les exposants de la salle n° 2 du Salon d’Automne auront été les premiers étonnés, j’imagine, d’apprendre qu’ils repré sentent toute la « Jeune peinture ». Parmi ces peintres, il en est d’ailleurs un, le plus talentueux, qui de temps en temps délaisse les gammes sombres dont il a communiqué le goût à ses amis, pour des gammes argentées tout aussi « modernes ». Il s’agit de Dunoyer de Segonzac, le moins sectaire des constructeurs, comme on dit. Si vous l’inter rogiez, il vous répondrait probablement qu’il y a au Grand Palais au moins quatre salles excellentes où la jeune pein ture revêt des habits moins austères. Je n’entreprendrai pas la description de ces salles, ni l’exposé des doctrines (cachées ou avouées) qu’elles illustrent. Je ne parlerai que de la salle n° 7, parce que je connais les aspirations des peintres qui y exposent et aussi parce qu’elle a été la plus calomniée par une certaine critique, insuffisamment désintéressée. Cette tristesse de l’œuvre peinte dont vous paraissez si ému, on l’a dénoncée également à propos de cette salle 7, d’où, au contraire, il me semble que la couleur et la fan taisie ne sont pas tout à fait bannies. Franchement, j’avoue ne voir aucune trace d’accablement ni de sénilité précoçe dans les toiles de MM. Bissière, Gernez, Simon-Lévy — et j’ai même cru broyer du noir. En effet si je pense que les questions de tristesse ou de gaieté, de laideur ou de beauté n’ont rien à voir avec l’art, je n’en ai pas moins, par nature, le goût de la couleur et de la grâce, et je préfère peindre « aigre », comme disent ces doctes messieurs, que peindre « blet ». — Oui, mais écoutons la voix « autorisée » de M. Vaux- celles : Ces peintres de la salle 7 sont des théoriciens; enfermés dans des formules étroites, ils jugulent leur sensi bilité et ne nous offrent que de tristes pensums, de couleur terreuse et de forme académique; je cours à la salle 2, chez les coloristes; suivez-moi — et surtout n’allez pas à l’Aca démie Lhote, mais à celle d’en face, etc... Ainsi par un miraculeux tour de passe-passe, ce sont les peintres du noir qui deviennent les coloristes, et les apôtres d’un art conditionné par la sensation (je parle ici des exposants de la salle 7), qui deviennent des académiques! Comment voulez-vous que je m’attache sérieusement à