— 346 — musique pertinente font illusion. Nina Payne a eu la coquet terie — ou le mauvais goût — de ne rien négliger pour nous déplaire. Elle s’entoure d’un appareil qui serait com promettant pour toute autre qu’elle. Son premier numéro : Black and White ne dépasse pas la médiocrité d’une quel conque exhibition de music-hall. Je dirais même qu’il n’y atteint pas, pour avoir voulu viser plus haut. Mais lors qu’elle apparaît en Egyptienne, toutes raisons de nous irri ter s’évanouissent. Le ridicule du costume est escamoté par l’arabesque d’un mouvement des bras. Mécaniquement, notre réceptivité élague ce qui n’est pas l’essentiel et le décor tombe comme une branche morte. L’exotisme, le côté « Nil » se perdent dans la frénésie du rythme, dans l’agres sive et géométrique beauté des gestes. Cléopâtre a rejoint Broadway. Définir cet art? Les deux extrêmes qui se touchent, une alliance de jaune et de bleu qui aboutit à un vert retentis sant, — l’équilibre qui résulte de la science et de la fantai sie de Nina Payne n’est pas autrement explicable. Au lieu de s’égarer dans cette systématisation naïve — raideur, sac cades, mécanique — qu’une sorte de faux-cubisme plas tique a mis à la mode, Nina Payne arrondit les angles et n’en garde pas moins leur relief à ses mouvements. Il se dégage de sa danse une sorte d’aisance mathématique, d’abandon rigide. Elle accommode l’invention la plus capri cieuse et la plus souriante d’une exacte et féroce mise au point. Ses gestes, d’une grâce incroyable, sont des signes à quoi nous reconnaissons tous les visages de notre vie, de même qu’un télégramme chiffré — pour qui sait le lire — peut contenir le plus beau sonnet du monde. Dans le numéro intitulé : la Femme de 1950 et dans les danses supplémentaires l’orchestre des Billy Arnhold lui apporte le prestige d’une collaboration on ne peut plus com préhensive et mieux concertée. Chaque note sait à quoi elle veut atteindre et va au but avec la même justesse précise que les gestes de la danseuse. Et lorsque, vers la fin, l’acro-