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ÇA IRA !
Une révolution se fait avec le
“matériel humain,,, que nous connais
sons. Si l’héroïsme du geste, parfois
emporte la foule vers un acte sublime,
trop souvent cette même foule se
livrera aux plus abjects débordements.
Si parfois elle s’élève jusqu’aux plus
purs sommets de l’abnégation, d’autres
fois elle ne cherchera que l’assouvisse
ment des bas instincts de la bête
humaine. Osons ne pas fermer les yeux
devant ces faits et les considérer quand
il le faut.
Car l’essentiel n’est pas de dire notre
rêve d’amour et d'harmonieuse com
munion entre les hommes, mais de
démêler ce que les conditions présentes
permettent de renouvellement.
Quand un état social en est arrivé au
point de ne plus pouvoir qu’accumuler
faute sur faute, quand toutes les institu
tions qu’il a imprégnées de son essence
se désagrègent, quand toutes les tenta
tives pour se resaisir aboutis ent à des
faillites, c’est que le mal qui le mine n’est
pas seulement de surface, mais au con
traire bien profondément ancré en lui.
La société, qui souffre de ce te gan
grène, ne connait qu’un seul remède :
le bistouri révolutionnaire.
L’histoire nous présente la révolution
sous deux formes. L’une anodine, la
révolution politique, se contente du
changement du régime gouvernemental.
Les causes profondes du malaise qui lui
donne naissance continuant à subsister,
les anciens accrocs ne tardent pas à
reparaître. Et tout est à recommencer.
L’autre, la révolution sociale, tente, avec
trop de rigueur à ses débuts et trop
unilatéralement — mais rigueur et uni
latéralité provisoirement nécessaires —
de rejeter de la structure sociale les
éléments dont la persistance au-delà du
terme où ils ont leur utilité, occasionne
les perturbations. Et elle les remplace
par des normes nouvelles qui traduisent
les aspirations des esprits novateurs et
qui confusément s’agitent dans la foule.
Et s’il est vrai que bien souvent les
circonstances obligent une révolution
à se reservir de formes antérieures
qu’elle désirait anéantir, il n’en est pas
moins vrai que, se plaçant à contre-pied
de l’état précédent, elle donne à ces
formes désuètes un sens nouveau. Et
ainsi une révolution sociale, venant à
son heure, est pour l’humanité un bien
inestimable.
Cette heure a sonné. Je ne répéterai
pas les raisons, énoncées plusieurs fois
déjà dans cette revue, de cette convic
tion. Mais j’en appelle à elles pour
rejeter, du point de vue social, les
méthodes préconisées par H. L. Follin
chez lequel l’idée de révolution — essen
tiellement politique — est censée ramener
l’harmonie dans les rapports économi
ques et sociaux.
Je veux essayer de résumer ce livre,
Et je ferai abstraction de la personnalité
de l’auteur qui force l’estime.
L’auteur suppose le “miracle,, accom
pli, et qu’un historien tente de récapi
tuler quelques années plus tard, cet
événement et les modifications qu’il
apporta dans la structure de l’humanité.
Cet historien débute par un réquisi
toire violent mais juste contre les ten
dances qui divisaient les hommes au
commencement du XX e siècle. Il
stigmatise l’aveuglement des dirigeants
(de nations et de classes), leur unique
souci d'arriver et leur insouciance des