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LE CRAPOUILLOT
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A la manière de Georges d’Esparbès.
UN ZOUAVE
A d'adjudant Flick du 27 me escadron du Train
ex-Roy al- Cambou is.
C’était aux heures noires de Charleroi, les zouaves ve
naient de pousser durant une demi-heure sur les mitrail
leuses allemandes, une effrayante charge à la baïonnette.
Fauchées, hachées, effilochées comme desfrandouilles, les
lignes de tirailleurs tourbillonnaient. C’était un maëls-
trom de viande. Les blessés, les morts se vautraient sur
un sol giclant de sang. Hagards, exorbités, les survivants,
tordus de terreur soudaine, lâchaient la bride à leur
âme et refluaient vers l’arrière comme un ressac d’hor
reur. C’était pourtant des blasés de la victoire, des ivres-
morts de la gloire coloniale, mais pour la première fois
ils reculaient.
Or gisait devant les lignes allemandes comme une
immense épave, le clairon géant Trique, dit « qu’est-ce
qui pue ? —C’est le bouc ». Un éclatement de 210 l’avait
assommé sans entamer le cuir coriace de sa chair bouca
née par tous les tropiques et il rêvait qu’il était mort et
qu’au ciel les géants de l’Empire, les ancêtres, ceux de la
Grande-Armée, l’accueillaient en lui offrant l’absinthe
qui est le pain et le sel du paradis des braves.
Mais, poussant de rauques clameurs, la horde teutonne
déboulait de ses trous ; c’était la contre-attaque « à l’alle
mande », contre les agonisants et les morts. Alors le
clairon Trique se réveilla.
— Paraît qu’c’est pas encore pour c’te fois ! rota-t-il
tout en numérotant ses abatis. Enfin, contre les kaiser-
licks du Tonnerre de Dieu un clairon de zouaves, ça fait
l’affaire. Puis sublime, il empoignait son instrument, le
clairon de l’Isly, de Palestro, de Gravelotte, et par défi,
bravade farouche, piqua les notes exaltantes : Y a la
goutte à boire là-haut, y a la goutte à boire !
Calottés par les ondes sonores les premiers rangs des
assaillants tombaient raide. Mais derrière, fourmilière,
marée, grouillis hurlant, la Germanie poussait. Trois
balles labourèrent comme des mouches la carcasse du
clairon Trique et ses deux oreilles sautèrent. Il rit gou
lûment, à vastes rasades.
— Paraît que ma gargoine vous attire, bande de
mouches à m... ». Et appuyant son Lebel contre sa
hanche gauche, Trique tout en sonnant la charge de la
main droite tirait sur la crapule. La viande feldgrau
tombait.C’étaitcomme siun vent eût gaulé desfruitsblets.
Mais la crapule tirait toujours et le bras droit de Trique
sauta sous une volée de balles.
— Il fait soif!» ricana Trique, et inclinant la tête, il
pompa galamment le sang de son moignon. Cependant
son bras gauche laissait choir le Lebel cochonnicide et
crochait le clairon frénétique qui reprit ses accents infer
naux. Pour reposer ses poumons, le soufflet de sa forge
à forger l’héroïsme, Trique, manchot, empoignait son
Lebel et en jouait un air. La crapule tirait toujours, régi
ment contre un homme ! Trique se muait en écumoire,
et criblé, en éponge à sang pressée par la mort. Son œil
droit, énucléé, jouait à l’escarpolette au bout du nerj
optique intact. 11 était beau comme la guerre.
En face, un mur, un monceau, un himalaya de cadavres
escaladait le ciel de la tuerie. Une décharge nouvelle
flamba qui cassa les deux cuisses du zouave qui croula
comme une tour. Il bavait écarlate, pétait du feu.
La sonnerie pourtant ne cessait pas. Ses. mâchoires de
héros s’étaient crispées sur l’embouchure de l’instrument
et le clairon sonnait toujours !
Le clairon sonnait la charge, avec sa mort, avec sa vie,
car une pluie pourpre fusait du pavillon d’or comme d’une
pomme d’arrosoir.
— Le général J offre qui suivai t l’action au télescope
viola son silence, son mutisme effrayant.
—- « Voilà un brave », dit-il.
— « Vive le Roy », répondit son état-major.
Et le couvercle du sépulcre de l’àme du grand-père
retomba.
Georges d’Esparrès.
71 la manière du “ Tigaro ”
DÉPLACEMENTS ET VILLÉGIATURES
M. Gabriele d’Annunzio(venant de Fiume) à Caporetto.
M. Maurice Rostand, à Saint-Jacut-de-la-Mer.
Le duc de Gontaut-Biron, à la Pétardière (Morbihan).
LaBaronne Fourton, née Danton douairière, àUhamonix
M. Raymond Poincaré, à l’Elysée.
On nous annonce, d’autre part, l’arrivée imminente de
M. Georges Mandel à M’ont faucon.
A la manière de l’Avenir.
GRAND CONCOURS
De qui est-ce?
— Ah ! je ne tuerai plus de charbonnière,
c’est trop salissant !
De qui est cette profonde pensée?
100.000 francs de prix