36 ailleurs que dans la tête du poète, il n’est pas beau par souvenir, il n’est pas beau parce qu’il nous rappelle des choses vues qui étaient belles, ni parce qu’il décrit de belles choses que nous avons la possibilité de voir. Il est beau en soi et il n’admet pas de termes de comparaison. Il ne peut pas se concevoir ail leurs que dans le livre. Il n’y a rien de semblable à lui dans le monde externe, il rend réel ce qui n’existe pas, c’est- à-dire il se fait lui-même réalité. Il crée le merveilleux et lui donne une vie propre. Il crée des situations extraordinaires qui ne pourront jamais exister dans la vérité et à cause de cela elles doivent exister dans le poème afin qu’elles existent quelque part. Lorsque j’écris « L’oiseau niché sur l’arc-en- ciel » je vous présente un phénomène nouveau, une chose que vous n’avez jamais vue, que vous ne verrez jamais et que pourtant on voudrait bien voir. Un poète doit dire ces choses qui sans lui ne seraient jamais dites. Les poèmes créés acquièrent des proportions cosmogoniques ; ils vous donnent à chaque moment le véritable sublime, ce sublime dont les textes ont tellement du mal à nous présenter des exemples si peu convaincants. Et ce n’est pas le sublime agaçant et grandiose, c’est un