Le Carnet des Lettres DES SCIENCES ET DES ARTS Raison et poésie Le murmure et les tumultes de la vie inté rieure, non critiques en sont ébaubis, parfois, Qomme si le poete n’avait pas dans tous les siècles écoulés la secrète voix qu'il est seul à entendre. IL n'y a pas de m°uvément plus complexe et enohevêUrè que cette élaboration de l'csu- vre d’art par toutes les forces coalisées de l'esprit et du cœur. C’est en somme sur elle que porte toute la dispute des classiques et aes romamiqojès, disons (pour parler vite, comme le malheureux Ori°u y est obligé) des rationalistes et des sensbbuistes. Ces der niers contestent plus ou moins, selon le dé- gré de leur vésanie, le rôle excellent de la raison. Contre eux, invoquons le témoignage, qui ne sera pas suspect, de Fernand Divoire. Dans sa dernière et curieuse composition, — Naissance du poème, chez Figuière, — Di voire a voulu noter, auront qu’une strophe venait au jour, toutes les paroles qui par laient des différents étages de l'être. li a ima giné onze de ces paliers et attribué à chacun d'eux le nom d'une muse, car U y a long temps que les hommes Ont donné aux neuf sœurs deux cadettes, il n'est pas possible de se méprendre sur les intentions de l'auteur. Ces -muses sont des créations personnelles, tes filles de ses fibres, des cris de son âme, dans son vocabulaire « les voix de l’hyper conscient. » IL les a nommées Musa la Gran de. Musurgue, VAthénienne, Museroie, la Sotte, Mussende, la Fleur, Musette, la Gra cieuse, Musiquette, dont le nom parle. Musée, qui sg souvient, Mu solda, nom d'étoile, Mu sarde, la nonchalante, Musangèrc, la mésan ge, et Muscieole, qui vit dans la mousse. Afin de rendre leur concert, le poète a dû adopter une disposition particulière, il a pris un album, reproduit, sous le nom du poète, ceux des onze muses, rangés dans une co lonne verticale ; voilà l’échelle de l'esprit. En regard de chaque Muse, horizontalement, il écrit, plus ou moins à droite de la page, ce qu’elle dit, le silence étant figuré, séton le vœu de Mallarmé, par le blanc du papier : c’est la succession des idées dans le temps. Par cet artifice, il présente simultanément et sans coirnnenta&re, les soliloques et tes dia logues de l’inspiration, ses progrès, ses in terruptions, son piétinement,- ses coups d'aile, ses affres et sa volupté. Eh ! bien, dans tout ce qu'il entend, il faut que le poète fasse un choix, il dit expressé ment : « Bruissez, voix mêlées parmi lesquel les je chercherai la voix qui est la voix que j'attends. , Comment la distinguer, sinon par discernement, ? Recommandation de la nom mée M’Usa : « La sûre voix sache la recon naître... » Le cri du cœur sera pesé par la raison, même dans ce lyrisme personnel dont le goût a rendu le vingtième siècle injuste. A a l'égard des autres modes de la poésie Et Museroie, qui n’est d°nc pas si sjodkb ■ « Dans quel ordre mettrons-nous; ces vers mè- > langés^mii yve'mit pas la strophe ? » _ imagine bien, que cette « prose sympho nique » n'est pas a'une lecture facile. L'on est payé de son effort par un petit poème sur l’dme de la forêt. Remarque : comme une chorégraphie a besoin de paraître en chair sur le plateau, la rèèitation est ici indispen sable, les douze voix : — Mais dix grandes pages, et les répandre sur plus de cent, pour expliquer la naissance de sept vers... — Ah ! il en faudrait dix mille ORION.