35 L’ŒUF DUR — lt LEON PIERRE-QUINT Histoire complète et authentique de la petite Carolamille PROLOGUE Histoire de l'enfance, de l'adolescence de Carolamille et de ses premiers pas dans la vie Carolamille était la plus douce et la meilleure des petites filles de son village. Ses parents lui avaient donné de longs cheveux et un mari, une dot et leur bénédiction. Elle eut des enfants, du talent, une existence charmante et médiocre, enviée et respectée... O Carolamille, que n’avez-vous su vivre ! Peigner votre cheve lure et caresser votre mari ! Pourquoi avez-vous persuadé votre bourgeoise paresse que vous étiez capable d’œuvre et d’action ? Et pourquoi avez-vous masqué votre féminité, votre passivité, vos impuissants désirs par une morale : indifférence et équi valence. Vous en abusâtes comme Jupiter, Barbe-Bleue ou Henri VIII abusèrent des femmes. I Comment Carolamille se libéra de sa chevelure, de sa famille et de son village Carolamille était la plus douce et la meilleure petite fille de son village. — A quoi bon être meilleure, dit-elle en sortant du lit de son mari ? Et elle s’avança vers une glace où elle crut que ses cheveux blonds avaient foncé. — Tous les cheveux blonds foncent, dit-elle. Blonds ou bruns, qu’importe. De même longs ou courts. Courts, ils seraient peut-être très beaux, et je deviendrai célèbre. Et si je ne le