ÇA IRA !
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Romain Rolland, Louise Bodin, et d’autres
encore, dont il estime la pacifique nature.
Enfin, dans un dernier poème, il décrit, scéni
quement, la pieuse visite qu’il fit à la chambre
de son ami, Marcel Toussaint-Collignon, un
jeune poète tombé au champ d’honneur.
La valeur de ces poèmes est leur inspiration.
Sous chaque vers, bat un cœur juvénile et bon.
Si des rythmes sont boiteux, si des phrases
sont difficiles et, même, dissonnantes, si Noël
Garnier n’est pas un impeccable artiste, il est
un véritable poète, et cela suffit à recommander
son recueil. W.K.
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* *
Melchisédechj suivi par Symiamire, par
Emile Dermenghem (La Connaissance, Paris).
Si l’auteur de ces deux petits romans a voulu
marquer une préférence envers le premier en
lui donnant la première place nous ne cacherons
tout de même pas que la seconde nouvelle
nous plait infiniment mieux que la première.
Sans doute Daniel (dans Melchisédech), Axel
(dans Symiamire) ne sont-ils qu’un seul et même
personnage. Cela ne nous empêche pas d’ac
corder à Symiamire une plus grande fraîcheur
de sentiments et d’idées, et de regretter la
tenue un peu factice de Melchisédech. L’amour
est une aimable illusion que les hommes pour
suivent en dehors d’eux-mêmes, sans jamais la
trouver, évidemment, et qu’ils laissent lamen
tablement mourir, comme une plante sans
soins, en-dedans d'eux-mêmes. Blanche, Axel,
et même Daniel sont les victimes de ces erreurs.
Tout a été dit sur l’amour, sur les êtres qui se
cherchent eux-mêmes dans les autres, comme
dans des miroirs, mais en même temps tout
reste à dire, ce qui fait que lorsqu’un auteur
analyse avec bonne foi et avec talent, les
éternels sentiments humains, il fait toujours une
œuvre utile et intéressante. Et lorsque, une
telle œuvre compte en plus de la finesse dans
l’analyse, de la justesse dans l’observation,
comme c’est le cas pour Melchisédech et
Symiamire, on ne peut que lui souhaiter de
nombreux lecteurs. M.V.E.
*
* *
La Lueur dans l’Abîme, par Henri Barbusse
(Paris, Editions “Clarté,,). — Malgré son titre
ronflant de rhétorique, le nouveau livre de
Barbusse vaut d’être lu.
Que de fois ne nous a-t-on pas répété que*
Barbusse n’est pas un grand artiste et ne le
sera jamais ! A-t-on raison ? A-t-on tort ?
Il est évident qu’un livre comme “ Clarté „
ou “ La Lueur dans l’Abîme „, considéré au
point de vue purement littéraire, n’a guère de
valeur bien haute. Mais il ne faut pas oublier
que ces œuvres ont un but tout spécial, que ce
sont avant tout des livres de vulgarisation et
que l’élément artistique y est forcément relégué
à l’arrière plan.
“ La Lueur dans l’Abîme „ est donc surtout
un ouvrage de propagande et c’est comme tel
qu’il convient de le juger. Disons tout de suite
qu’à ce point de vue il peut faire de l’excellente
besogne, exercer une influence salutaire.
Le livre est divisé en trois parties bien
distinctes. Dans “La Fin d’un Monde,, l’auteur
démasque bon nombre de travers et d’abus
flagrants, dénoncés la plupart depuis bien
longtemps, mais qu’il est bon de rappeler à
certains esprits trop prompts à s’assoupir. La
seconde partie, “ La Révolte de la Raison „,
qui veut reconstruire après avoir détruit, ne
nous paraît guère transcendante. Barbusse
veut, en quelque sorte, y faire œuvre de socio
logue, bâtir la “ cité de lumière „ et montrer
le chemin à suivre ; mais il reste superficiel et
touche bien rarement le fond de la question.
Cela a été fait à dessein, évidemment, le livre
étant surtout destiné à la propagande et
devant pouvoir “ être mis entre toutes les
mains „. Et comme conclusion, le livre nous
donne le programme et l’action du groupe