52 ÇA IRA ! ara Les Livres Hôtel-Dieu, Récits d’Hôpital en 1915, par P,-J. Jouve, ornés de 25 bois gravés par Frans Masereel, Paris Ollendorff. Ce livre est un de ceux, si rares, dont on ne saurait assez parler ni assez fréquemment recommander la lecture. Aussi n’hésitons nous pas à en donner notre humble impression malgré les trois mois qui nous séparent déjà de la parution de cette édition. “ Hôtel-Dieu „ c’est toute la guerre vue du coté le plus lamentable : l’Hôpital où en échouent toutes les épaves. Par un art génial et simple à la fois l’auteur a renfermé dans les sept récits, qui composent ce petit livre, toutes les souffrances, toutes les misères, toutes les déchéances aussi, qu’on a fait subir au pauvre bétail humain. Voici la démence ; voici la ma ladie, les peines, les souffrances, toutes les douleurs ; voici le désespoir, les illusions mort- nées, l’angoisse, le doute et le remords. Par dessus tout voici la Mort. Par des notations justes, par un raccourci synthétique Jouve nous donne de la vie d’hôpi tal une représentation saisissante de vérité. Le blessé, le souffrant, le malade, l’agonisant for ment le centre de ces récits, mais tout autour gravitent, éclairés d’un jour impitoyable, les médecins avec leur insouciance ou leur commi sération, les infirmiers apitoyés ou cyniques et .— vues comme il faut les voir — les infirmières sensuelles et frivoles. Si les sept récits sont d’une égalité de touche et d’écriture admirables, c’est néanmoins dans “ Le Père-Blanc „ que l’auteur a atteint le plus intensément au pathétique. C’est un livre qu’il faut lire. M.V.E. * * * Le Sacrifice d’Abraham, par Raymond Lefèvre (Paris Flammarion). Ceci n’est pas seulement une histoire de guerre, comme il y en a tant, c’est peut-être bien l’histoire de la guerre que nous vécûmes. Cette guerre, comme toutes celles qui précédèrent, comme aussi toutes celles qui suivront, fut essentiellement l’œuvre des vieil lards qui sacrifièrent à leurs idéaux pourris le sang frais de toute une génération. Testut, le héros principal de ce roman est surpris par la guerre au milieu de ses collec tions et de ses travaux. Il doit fuir, quitter ces chers débris et sa chère bibliothèque. Il a voué une haine implacable aux allemands, qui l’ont dérangé. L’auteur s’ingénie a nous montrer un à un les soubresauts, les modifications et les varia tions de ce sentiment dans l’esprit du héros, selon les évènements et les circonstances qu’il traverse. C’est là un cas psychologique bien difficile à analyser, surtout pour un homme qui, comme Raymond Lefèvre a pris une part active à la guerre, et qui, de ce fait, court toujours le risque de partialité. Il s’en est cependant tiré avec honneur. Il a réussi à ne laisser percer nulle part, ni sa rancune d’oiseau blessé par le monstre, ni son âpreté de militant. Tout le livre est éclairé par la présence épisodique de Mathieu Testut, le fils, repré sentant la génération sacrifiée, et dont le caractère, tout en nuances, est bien décrit. Il en est de même des autres personnages, Madame Testut et sa sœur dont il a fixé la silhouette d’un trait impitoyable. Seul la sœur de Mathieu, Jacqueline, nous semble avoir été ratée. M.V.E. * * * Au-dessus de la ville, par Edmond Jaloux (Paris, La Renaissance du Livre). Constance, l'héroïne de ce roman est une âme aux prises avec le Devoir et autres grands mots à majuscule et qui est vaincue par eux. Elle soigne sont frère malade, maniaque et