ÇA IRA ! 164 l’unité humaine. Comme tel il est la base d’un culte de l’homme, le signe d'une tendance générale humaine vers la joie et le bonheur, la reconnaissance de l'amour comme étant la force vitale de l'humanité. Mais en même temps le communisme est une lutte sans merci, contre les forces qui empêchent l'unifi cation de l’humanité : la bourgeoisie et tous ceux auxquels le bandeau de l'idé ologie bourgeoise obture encore les yeux. Avant que l'unité humaine puisse être réalisée éclatera encore une fois toute l'amertune de la haine de l’homme contre l’homme, d’une classe contre une autre classe, comme l’âpre froid pique et écorche le plus aigrementpeu avant que le soleil réchauffe généreusement la terre. Le prolétariat ne peut échapper à cette contradiction entre le but et les moyens, entre l’être du communisme comme idéal et ses formes de combat, c'est â dire entre son aspect d’Eglise triomphante et d’Eglise militante. Si dès le début le communisme porta en lui cette contradiction, elle ne devint toute fois brûlante que lors de l’éclosion de la Révolution Universelle. Et elle ne pourra être résolue avant que la révo lution ait accompli son cours triomphant sur la terre. Cela signifie-t-il que la masse souffran te et combattante devra attendre la nouvelle beauté après laquelle elle sou pire, jusqu’à ce que ce long chemin soit parcouru? Que le prolétariat devra rester muet durant tout ce temps et que le bonheur de recréer ses immenses efforts en harmonie idéale lui sera refusé? Non : cela signifie seulement que l’art du communisme militant représentera non pas la multiple harmonie encore à naître, mais bien, en formes idéales, cette contradiction intérieure vraiement tragi que, afin que le pathos de cette repré sentation élève la masse au dessus de ce que la vie a de blessant et de tourmen tant, au dessus de la douleur et de l’im- > pureté de la vie quotidienne. Comme la lutte révolutionnaire, par les sacrifices illimités qu’elle exige, les désirs infinis qu’elle éveille, les flots inouis d'amour et de haine qu’elle soulève, purifie le le prolétariat de la lâcheté et de l’égo- isme de la mesquinerie bourgeoise et de toute défaillance, cette lutte réveillera dans le prolétariat l’aspiration à la réno vation de la douleur, des passions et des désirs par la beauté. Le créateur de l'ère nouvelle sentira la nécessité d'être haussé au-dessus de sa propre activité. Il sentira la nécessité de calmer son cœur brûlant tout â la fois d’amour et de haine, d'adou cir la douleur torturante qui le harcèle par le spectacle de ses forces et de ses actions poussées au sublime. Il désirera ardemment vivre encore une fois la sau vage grandeur de ces temps purifiés par le souffle de la beauté et participer, dans cette revivance à la partie la plus noble de l’âme commune ; se confondre avec l’Image, l’Idée du Prolétariat Universel. L’effort social et l'élévation intellectuelle, la conscience des pouvoirs infinis de l’homme et de la sainteté de la vie, le besoin d'une purification et d’une régénération par l'art : voilà les forces qui au temps de la révolution pro létarienne renouvelleront l’art drama tique. Pour que ces forces puissent se dé ployer il faut un commencement de victoire. Cell-ci seule garantit l'indépen dance intellectuelle et donne des loisirs,