JE N’AI JAMAIS PU QUE METTRE DE L’EAU DANS MON EAU. IMMIFESTE CIIIIHLE DADA Vous êtes tous accusés; levez-vous. L’orateur lie peut vous parler qu esi vous êtes debout. Debout comme pour la Marseillaise, debout comme pour l’hymne russe, debout comme pour le God save the king, debout comme devant le drapeau. Enfin debout devant DADA qui représente la vie et qui vous accuse de tout aimer par snobisme, du moment que cela coûte cher. Vous vous êtes tous rassis? Tant mieux, comme cela vous allez m’écouter avec plus d’attention. Que faites vous ici, parqués comme des huîtres sérieuses — car vous êtes sérieux n’est-ce pas? Sérieux, sérieux, sérieux jusqu’ à la mort. La mort est une chose sérieuse, hein? On meurt en héros, ou en idiot ce qui est la même chose. Le seul mot qui ne soit pas éphémère c’est le mot mört. Vous aimez la mort pour les autres. A mort, à mort, à mort. Il n’y a que l’argent qui ne meurt pas, il part seulement en voyage. C’est le Dieu, celui que l’on respecte, le personnage sérieux — argent respect des familles. Honneur, honneur à l’argent: l’homme qui a de l’argent est un homme honorable. L’honneur s’achète et se vend comme le cul. Le cul, le cul représente la vie comme les pommes frites, et vous tous qui êtes sérieux, vous sentirez pius mauvais que la merde de vache. DADA lui ne sent rien, il n’est rien, rien, rien. Tl est comme vos espoirs: rien, comme vos paradis: rien, comme vos idoles: rien, comme vos hommes politiques: lien, comme vos héros: rien, comme vos artistes: rien, comme vos religions: rien. Sifflez, criez, cassez-moi la gueule et pois, et puis? Je vous dirai encore que vous êtes tous des poires. Dans trois mois nous vous vendrons, mes amis et moi, nos tableaux pour quelques francs. (DADAphone, No. 7. Paris, Mars 1920.) Francis TICABIA. TOM 2