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geni que Victor Hugo, s’il n’avait fait que des romans, des
drames et des lettres.
Alexandre Dumas fds ne fera jamais, au grand jamais, un
discours de distribution des prix pour un lycée. Il ne connaît
pas ce que c’est que la morale. Elle ne transige pas. S’il le fai
sait, il devrait auparavant biffer d’un trait de plume tout ce
qu’il a écrit jusqu’ici, en commençant par ses Préfaces absurdes.
Réunissez un jury d’hommes compétents : je soutiens qu'un
bon élève de seconde est plus fort que lui dans n’importe quoi,
même dans la sale question des courtisanes.
Les chefs-d'œuvre de la langue française sont les discours
de distribution pour les lycées, et les discours académiques.
En effet, l’instruction de la jeunesse est peut-être la plus belle
expression pratique du devoir, et une bonne appréciation des
ouvrages de Voltaire (creusez le moi appréciation )\ est préfé
rable à ces ouvrages eux-mêmes. — Naturellement !
Les meilleurs auteurs de romans et de drames dénatureraient
à la longue la fameuse idée du bien, si les corps enseignants,
conservatoires du juste, ne retenaient les générations jeunes
et vieilles dans la voie de l’honnêteté et du travail.
En son nom personnel, malgré elle, il le faut, je viens renier,
avec une volonté indomptable, et une ténacité de fer, le passé
hideux de l’humanité pleurarde. Oui: je veux proclamer le beau
sur une lyre d’or, défalcation faite des tristesses goitreuses et
des fiertés stupides qui décomposent, à sa source, la poésie maré
cageuse de ce siècle. C’est avec les pieds que je foulerai les stances
aigres du scepticisme, qui n’ont pas leur motif d’être. Le juge
ment, une fois entré dans l’efflorescence de son énergie, impérieux
et résolu, sans balancer une seconde dans les incertitudes déri
soires d’une pitié mal placée, comme un procureur général,
fatidiquement, les condamne. Il faut veiller sans relâche sur
les insomnies purulentes et les cauchemars atrabilaires. Je-
méprise et j’exècre l’orgueil, et les voluptés infâmes d’une
ironie, faite éteignoir, qui déplace la justesse de la pensée.
Quelques caractères, excessivement intelligents, il n’y a pas
lieu que vous l’infirmiez par des palinodies cl’un goûl douteux,
se sont jetés, à tête perdue, dans les bras du mal. C’est l’absinthe,
savoureuse, je ne le crois pas, mais, nuisible, qui tua morale
ment l’auteur de Rolla. Malheur à ceux qui sont gourmands!
A peine est-il entré dans l’âge mûr, l’aristocrate anglais, que