28 les grands bars aux femmes pailletées, la modiste du village perdu dans les prairies, les voleurs de bétail et les vachers aux jambes de fourrure, toute la danse de l’Ouest sur l’écran presqu’aussi beau que la vie. Du mirage occidental qu’il reste peu dans les contes d’O. Henry ! C’est à peine si vers la fin du livre quelques mauvais garçons se dressent au-dessus de leurs chevaux, debout dans leurs étriers, pour crier la joie de tuer sans raison. Le plus souvent quels pitoyables aven turiers se mêlent à ce petit monde de pasteurs, de juges, de logeuses et de noceurs conventionnels qui s’agitent suivant la morale niaise des films sentimentaux. Qu’aurait écrit Maupassant s’il avait eu l’accent américain? LOUIS ARAGON. LES SPECTACLES Le Prix du Conseil Municipal. Les mains tremblantes des joueurs et le sourire des snobs réjouissent les pick-pockets qui savent gagner leur pain à la sueur de leur front. Les chiffres volent sur cette pelouse. Dans ces grandes minutes, les villes sont oubliées, les cartons verts sont plus lointains que les nuages. Chaque homme, en enten dant le galop des chevaux, se sent l’âme d’un assassin. Le tumulte et le calme naissent aussi brusquement. Les chevaux que l’on sort des écrins au bon moment sont des monstres charmants. Mais le plus beau fut assurément ce gros homme qui fumait un cigare et qui attendait très grave ment le soir. 11 pensait au lendemain qui sera tellement sem blable à aujourd’hui. 11 y a les cocktails, les taxis et les fleurs artificielles. Il y a les cigares, les chaînes de montre et les réverbères. « Voici le temps des assassins ». Aux courses on sent la vieillesse morose s’approcher. Bien tôt nous n’aurons plus vingt ans et nous ne comprendrons plus la beauté des crépuscules ou des pourritures qui fleuris sent dans les ruisseaux.