” — — — mm 130 ANDRÉ LHOTE moyens d’expression cubiste. — Dualisme ? Non : il fut un temps : 1911-12-13-14 où l’inspiration cubiste était moins courte qu aujourd’hui. Légèrement teinté de futurisme, le mouvement novateur d'alors, auquel je coopérais, recherchait les spectacles animés. Il ne craignait pas de « raconter » — et que peuvent craindre des artistes qui se sentent jeunes et pleins de forces créatrices ? Les ports, avec leurs voiles qui se mélangent aux façades des maisons ; les fêtes foraines et leurs tournoie ments métalliques ; Paris, ses toits, ses ponts et sa Tour- Eiffel, étaient les sujets préférés de ces peintres épris de mouvement. La vision du commun des hommes qui est successive, qui inventorie, qui dénombre, qui additionne sans cesse, sans s’arrêter à la somme convenable, leur paraissait im propre à dresser une image véridique d'un spectacle. Dans un port, par exemple, l'échelonnement successif des bateaux et des maisons, ou cliché panoramique, devait le céder à cette architecture légère de fumées, de mats, de nuages et de cordages qui s'en détache lorsque le regard, impatient de tout voir, relie simultanément tous les élé ments épars en une gerbe expressive. Le but visé par le peintre n'était pas de dresser un inventaire d'objets éche lonnés, qu'une vision fragmentaire et méticuleuse perçoit, mais de donner l'équivalent plastique de la poésie que dégage un ensemble de formes vivantes. Les grues qui tournent, les drapeaux qui claquent, les fumées qui mon tent, les voiles qui se gonflent, voilà un spectacle qui mérite autre chose qu'un dessin académique, exact et glacé. Une cristallisation de formes simples, coupée par endroits, un chevauchement de plans différemment historiés, recou verts de tons légers, essayaient de donner du sujet mul tiple et mouvant une représentation dynamique. Un