PIERRE BONNARD
PIERRE BONNARD est né le 30 octobre 1867. à Fontenay-aux-Roses. d’une famille
bourgeoise. Son père était directeur au ministère de la guerre. Après avoir été étudiant en
droit, Pierre Bonnard est. en 1888, élève à l’Académie Julian où le massier s'appelle Sérusier
et où il a pour condisciples Vuillard, Roussel, Ibels, René Piot, Maurice Denis. À ces jeunes
d’alors, qui fondent le célèbre diner des Nabis, Sérusier révèle la lecon de Gauguin. Les
Nabis, qu’on appelle aussi les symbolistes et les synthétistes, constataient la pauvreté de
pensée de l’impressionnisme, déploraient son ignorance de la géométrie, s’ils renoncaient
à l’idéal de ressemblance pittoresque dont se satisfait l’art officiel. Ce n’est qu’en 1899,
après avoir échoué au concours de l’enregistrement et avoir fait de timides essais de fonc-
tionnaire au Parquet, que Pierre Bonnard se consacre définitivement à la peinture.
Il est d'abord influencé par Lautrec, puis par les Japonais dont les mises en page. sans
rapport avec les habitudes de l’art occidental, commencent déjà de le tenter. Il est alors
dominé par des préoccupations décoratives, comme en témoignent les quatre panneaux
peints à la colle, qu’en 1891 il expose aux Indépendants. Il brosse des décors de théâtre,
exécute de nombreuses lithographies et affiches, notamment pour la « Revue Blanche » et des
illustrations pour Parallèlement et Daphnis et Chloé, prélude aux admirables illustrations
qu’il donnera dans sa maturité à Ambroise Vollard.
Après les œuvres fraiches de ses débuts. sa palette s’est assombrie. Mais, vers 1905,
il revient aux couleurs claires de l’impressionnisme. Et dès lors c'est la marche triomphale
vers la couleur absolue dont sa vieillesse ne cesse d’attiser le lyrisme toujours plus jeune.
Après avoir fait de nombreux voyages et avoir reçu de la Provence la révélation de son
génie, Bonnard, depuis plus de trente ans, passe l’hiver au Cannet et l’été à Paris et à
Vernon.
Bonnard a peint de nombreux portraits, ceux de Georges Besson, de Vollard, de J. Hessel,
de Vuillard, de Thadée Natanson et de nombreuses jeunes femmes. Il a peint des paysages
d'Ile-de-France et de Provence. Mais il est, avant tout, le peintre-de la Parisienne, de
l’élégante qu’il situe dans l’atmosphère de fête du Jardin de Paris, comme de la midinette
qui s’affaire, un carton à chapeaux au bras, dans le tumulte de la Place Clichy dont son
œuvre, à diverses reprises, a fait vivre le décor.
Il n’a cessé de peindre ces femmes blondes qu’aucune pensée n’occupe et dont la seule
raison de vivre est de cueillir des fleurs, des fruits, de ranger leurs armoires, de se pencher
sur des corbeilles où dorment des laines multicolores, de caresser des chiens aux longues
oreilles, ou encore de laisser resplendir leur chair dans l’eau verte des baignoires.
Dans sa maison modeste du Cannet, Bonnard mène l'existence la plus simple. Ses vête-
ments sont ceux d’un jardinier, d’un artisan. Il fait la queue avec les ménagères. Il n’a
jamais eu d’autre luxe, d'autre ambition que son art. L’interroge-t-on, il parle de miracle,
reconnait qu’il a eu quelques réussites heureuses. Le félicite-t-on d’avoir exalté une après-
midi de soleil, il rappelle, sans se fâcher, qu’il pleuvait ce jour-là, et déclare qu'il n’est pas
mécontent de la tache noire du parapluie. Par le plaisir qu’il nous donne il prouve que
sa vérité est meilleure que la nôtre.
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