Kunsthaus
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IZÜRCHER KUNSTGESELLSCHAFT
Auguste RODIN
1840 - 1917
EXPOSITION DE SCULPTURES
AQUARELLES, DESSINS
ET ESTAMPES ORIGINALES DU MAÎTRE
ORGANISÉE PAR LA
.
Société des Beaux Arts de Zurich
(ZÜRCHER KUNSTGESELLSCHAFT)
et le Musée Rodin
INTRODUCTION ET NOTICES
PAR
M. LÉONCE BÉNÉD1TE
» Conservateur du Musée National du Luxembourg
et du Musée Rodin
23 Juin — 28 Juillet 1918
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AUGUSTE RODIN
1840-1917
François-Auguste-René RODIN est né à Paris le 12 novem-
bre 1840, au n0 3 de la rue de l’Arbalète, en plein quartier
populeux, dans l’humble logement d’un petit employé, Jean-
Baptiste Rodin, garçon de bureau, puis inspecteur à la Pré-
fecture de police et de Marie Cheffer, son épouse. Le père était
Normand, étant né à Yvetot; la mère, née à Landrojf, près
Metz, était donc Lorraine.
Rodin était le cadet de deux enfants. L’aînée était sa sœur
Maria, plus âgée que lui de deux ans. Elle fut emportée en
décembre 1862, à la suite d’une rapide maladie et après avoir
pris le voile. Dans ce milieu pauvre, mais très uni et très reli-
gieux, cette sœur fut la grande affection de la jeunesse du maître.
On verra tout à l’heure quelle fut la conséquence du chagrin que
lui causa cette perte.
Malgré la situation très modeste du ménage, ces enfants
furent élevés et instruits avec soin, la sœur Maria au couvent, le
jeune Auguste, d’abord à une école des Frères, dans le quartier
du Val-de-Grâce, puis à Beauvais, dans l’institution de son
oncle Alexandre.
Si médiocre, en effet, que fut la situation paternelle, cet oncle
Rodin était parvenu à se faire une situation assez relevée.
C’était, d’après les souvenirs du maître, un esprit d’une certaine
culture; il s’était voué de bonne heure à l’enseignement et diri-
geait avec succès cette institution qui faisait concurrence au
Collège de la Ville. Rodin fut donc mis en pension chez son
oncle et y demeura jusqu’à sa quatorzième année.
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A ce moment, ses goûts pour le dessin parurent si prononcés
que, sans qu’il y vit encore une vocation décidée vers les arts,
le père crut y trouver une indication pour l’avenir de son fils.
Il le rappela à Paris et le fit inscrire à l’École de dessin et de
mathématiques, rue de l’École de Médecine.
Cette École « la petite École » comme on la désignait alors
par rapport à l’École des Beaux-Arts, était surtout réservée à la
formation des jeunes artisans qui se destinaient aux industries
artistiques. On ne rêvait guère, d’ailleurs, à cet instant, d’autre
avenir pour le jeune homme.
Le directeur, à cette époque, était le peintre Belloc; il avait
près de lui un professeur qui a laissé un nom inoubliable, non
point, certes, comme artiste, mais comme pédagogue: C’estLecoq
de Boisbaudran. Il avait créé, par sa méthode du dessin de
mémoire, un enseignement qui faisait concurrence à celui de
l’École des Beaux-Arts et il avait formé, en deux ou trois
générations, une magnifique pléiade d’artistes. Il eut, en effet,
pour élèves des maîtres qui devaient signer plus tard leurs
chefs-d’œuvre des noms de Fantin-Latour, de Cazin ou de
Legros, de Lhermitte ou de Guillaume Régamey, de Gaillard
ou de Roty, de Dalou ou de Rodin.
A vrai dire, ce ne fut qu’indirectement que Rodin subit
l’action de ce maître; mais il reçut, près de lui, dans cette Ecole
et dans cette atmosphère vivante de travail intelligent et d’études
réfléchies, les conseils et les encouragements d’un professeur, le
statuaire Fort, qui a laissé peu de traces dans l’histoire, mais
qui, d’après les souvenirs reconnaissants de Rodin, devait
exercer un véritable ascendant sur ses élèves. Rodin affirmait
qu’il lui devait sa vocation. Il suivait également, le soir, les
cours des Gobelins, où il était corrigé par un professeur
aussi modeste, nommé Lucas, à qui Rodin gardait également
beaucoup de gratitude. Les maîtres avaient, évidemment, deviné
en ce jeune homme ardent, studieux et appliqué, sinon le destin
qui l’attendait, du moins un vrai avenir d’artiste.
Cette vocation étant devenue manifeste, on se décida à
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consulter, par l’entremise d’une amie de la famille, un artiste en
renom, le sculpteur Maindron, l’auteur romantique de la
célèbre Velleda du Luxembourg, où cette statue fit si longtemps
vis-à-vis à l’Age d’airain.
Le verdict ayant été favorable, Rodin fut autorisé à se faire
inscrire à l’École des Beaux-Arts. Il y fut refusé trois fois.
Alors, comme il faut vivre et apporter son salaire à l’humble
foyer, Rodin fait, à cette heure et durant bien des années, tous
les métiers se rapportant de près ou de loin à sa profession:
mouleur, ornemaniste, praticien, orfèvre, recueillant, avec sa
curiosité toujours en éveil, son esprit observateur et attentif, son
intérêt et son énergie inlassable au travail, de toute cette
besogne médiocre de subalterne salarié de précieuses notions
pour son avenir d’artiste. C’est dans ces ateliers de décoration
et d’ornement qu’il reçut d’un simple artisan, nommé Constant
Simon, une leçon que Rodin se plaisait à rappeler et qu’il
raconte dans ses Entretiens (1) sur l’art : il lui indiqua que la
sculpture doit être traitée non en surface mais en profondeur, que
la science du modelé est la clef de toute la sculpture. Il reçut, là,
également, les encouragements d’un artiste de talent, qui fut
à la fois un savant et habile décorateur, le sculpteur roman-
tique Klagmann, l’auteur de la Fontaine Louvois et le restaura-
teur de la Fontaine de Médicis.
A ce moment (1863) se place un petit événement assez piquant
dans la carrière du maître. Rodin entre dans les Ordres, il
s’engage chez les Eudistes, faubourg Saint-Jacques, et endosse
la soutane. Il obéit, avec la violence de son tempérament très
sensible, très affectueux et très impulsif, à un accès de désespoir
causé par la mort de sa sœur, la fidèle amie de toute son
enfance. Ce prurit de dévotion ne dura pas d’ailleurs très
longtemps. Au bout de cinq ou six mois, Rodin rentra au foyer
paternel et il ne tarda pas en s’en créer un lui-même en associant
à son existence et à son labeur celle qui fut sa compagne d’un
(1) L’Art, Entretiens réunis par Paul Qsell, Paris, B. Orasset, 1911, p. 64.
demi-siècle et qui l’a précédé seulement de quelques mois dans
leur dernière demeure que domine, au haut de la colline de
Meudon, l’image méditative du Penseur.
Nous arrivons à la date de 1864, c’est celle où Rodin suit les
cours de Barye au Muséum et où il entre, comme aide, dans
l’atelier de Carrier-Belleuse. Ces deux artistes, dont les noms
accouplés détonnent si étrangement, sont donnés généralement
— et par le fait de Rodin lui-même - comme ses maîtres. En
vérité, Rodin ne s’était inscrit comme leur élève sur les livrets des
salons que pour se conformer à l’usage et pour affronter les
rigueurs du jury sous leur double autorité. Mais l’un fut
seulement son professeur dans un cours public et l’autre son
patron. On ne peut pas dire, cependant, qu’ils n’aient pas
exercé quelque action sur l’esprit du jeune artiste, mais ce n’est
que plus tard qu’il comprit la gravité hautaine du génie de
Barye, tandis qu’il fut entraîné, malgré lui peut-être, avec
indulgence et sympathie dans la voie du moderne Clodion.
Il travailla beaucoup pour lui et il l’imita.
Rodin resta, en effet, six ans chez Carrier-Belleuse, de 1864
à 1870. En février 1871, ayant étéjugé impropre au service de-
guerre, il suivit son patron en Belgique avec l’espoir de conti-
nuer à travailler à son côté, mais il se produisit une mésen-
tente entre eux; il le quitta, pour s’associer au sculpteur belge
Van Rasbourg, avec qui il collabora aux travaux de décora-
tion de la Bourse et du Palais des Académies à Bruxelles.
Jusqu’à ce séjour en Belgique, les œuvres connues de Rodin
sont peu nombreuses : Il faut placer en première ligne comme
date, le buste de son père, d’une tournure grave, d’un accent
décidé, qu’une légende familiale considère comme ayant été
exécuté à l’âge de dix-sept ans, mais qui, d’après le maître, ne
serait pas de beaucoup antérieur au buste suivant, daté expressé-
ment, celui-ci, des premiers mois de 1863. C’est le buste du
père Aymard, supérieur des Eudistes, auquel Rodin s’attacha
alors qu’il prit la soutane. Cet ecclésiastique, dont Rodin parlait
avec un souvenir plein d’estime, avait compris que la vraie
— 7 -
vocation du jeune homme n’était pas parmi eux; il lui avait fait
arranger un atelier et il l’avait doucement poussé à rentrer chez
ses parents. Ce buste fort remarquable, atteste les dons d’obser-
vation ingénue, fidèle et compréhensive de la nature qui distin-
gueront plus tard le génie du grand artiste. Le troisième
ouvrage connu est le masque célèbre de l’Homme au nez cassé,
devenu classique, qui figure dans toutes les grandes galeries
du monde et qui fut, cependant, refusé au salon de 1864.
Ces trois morceaux, — je signale seulement en passant les
travaux salariés pour les cariatides du théâtre des Gobelins, la
cheminée du théâtre de la Gaîté, le fronton du Cirque d’Hiver
et maints petits sujets de commerce — ces trois morceaux inau-
gurent déjà avec une certaine autorité la carrière du maître
sculpteur de notre temps.
Mais cet inconnu d’hier allait bientôt se manifester par une
œuvre si nouvelle et si imprévue qu’elle devait susciter un inévi-
table scandale.
Rodin, 011 vient de le dire, était allé se fixer à Bruxelles
en 1871. Il s’y installa avec sa jeune compagne et travailla
d’abord laborieusement et consciencieusement aux ouvrages de
décoration absorbants pour lesquels il s’était mis en société
avec Van Rasbourg. En 1875, dans un moment de répit, ayant
ramassé un petit pécule, il satisfit une envie devenue irrésistible,
il fit un bond en Italie. Il n’y fit pas un long séjour, ses
ressources, d’ailleurs, étaient modestes. Il ne vit que Rome et
Florence. Il ne vit et n’était venu voir que Donatello et que
Michel-Ange. Mais il revint tout plein d’eux, tout imprégné
d’eux et leur grand souvenir va marquer son empreinte sur ses
prochaines œuvres.
La première, cependant, fait une curieuse exception. Secoué par
ce contact avec les grands initiateurs, Rodin prend son essor,
se met à l’ouvrage et met sur pied la statue, désormais célèbre
dans le monde entier, sous le nom de l’Age d’airain. Elle offre
peut-être la fière élégance d’un bronze de Donatello, mais elle est
si près de la nature et si près de la vie, qu’on ne pense à aucun
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maître qu’à Rodin lui-même et que, même, surpris par cette
œuvre d’un inconnu, qui détonnait si étrangement au milieu
des productions habituelles d’école, ses confrères parisiens, peu
attentifs à ce qu’il y avait justement d’interprétation supérieure
de la nature, crurent à une imposture, crièrent au moulage sur
le modèle et suscitèrent un véritable scandale. Ce fut le premier
de la carrière de Rodin, ce ne devait pas être le dernier.
Mais ce scandale même l’avait mis en évidence, des protesta-
tions indignés avaient eu lieu de la part d’un groupe d’artistes
hautement autorisés. L’État réparait cette injure en acquérant le
bronze de la statue incriminée et, ce qui est à l’honneur de son
administration, continua à assurer à celui qui était déjà un
grand artiste, sa sympathie et sa protection. Bientôt après, en
effet, l’État lui acquérait le Saint Jean-Baptiste, qui était placé
au Musée du Luxembourg et le sous-secrétaire d’État, Turquet,
comme compensation à ses ennuis récents, lui offrait le choix
d’une commande.
Rodin, tout vibrant et tout ému encore de son séjour à
Florence, sollicita la commande d’une Porte pour le futur Musée
des Arts Décoratifs, inspirée de la Divine comédie de Dante.
Après ce salon de 1877, Rodin était retourné définitivement à
Paris. La Belgique n’était plus un champ assez vaste pour son
activité. Il était entré dans la lutte et son esprit combatif se
préparait aux prochaines rencontres. Il fit d’abord un tour de
France pour visiter les Cathédrales. C’est la première de ces
tournées auxquelles il se plut si souvent à travers les trésors
d’architecture de nos provinces. Car Rodin, comme Cazin,
comme Alphonse Legros, comme la plupart des anciens élèves
de la « Petite École » s’était plu à toucher à tous les modes de
l’art. Il a peint dans sa jeunesse quelques portraits sobres et
expressifs; en Belgique, dans ces bois de la Cambre ou dans la
forêt de Soigne, où il se plaisait à prendre ses délassements
dominicaux, il se reposait des fatigues de la semaine en brossant
de vigoureuses pochades d’une saveur très romantique ; à son
retour à Paris, employé à la manufacture de Sèvres, où il
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faisait des journées comme un simple ouvrier, il a exécuté
plusieurs vases en céramique. Les quelques pointes sèches qu’on
lui doit le classent comme un graveur de premier ordre. Mais
Rodin rêva par dessus tout l’architecture. Dans tous ses
voyages, il s’arrête devant les monuments pour les étudier et
en noter les détails intéressants ; il a laissé des dossiers pleins
de notes écrites ou de croquis précieux d! observation sinon
même d’invention, dans cet ordre d’idées. On en connaît un
spécimen très significatif par son beau livre sur les Cathé-
drales de France. Le premier voyage en France comme le
premier voyage en Italie laissa donc des germes profonds
dans son esprit; on les verra lever un peu plus tard.
Pour l’instant, rentré à Paris, et remis de ses précédentes
émotions du Salon, où le jury, en manière de réparation, l’avait
récompensé d’une mention honorable en 1879 et d’une troisième
médaille en 1880 pour le bronze de l’Age d’airain et le plâtre de
Saint Jean-Baptiste, Rodin s’attaque à sa nouvelle commande :
la Porte de l’Enfer, commande ratifiée en 1880.
Ce travail occupa et passionna Rodin plus de vingt années.
Il y a répandu à profusion tous les dons variés de son génie: la
force et la virilité, l’abandon, la mollesse et la grâce, et par
dessus tout ce don de la vie dans le mouvement qui en est une
caractéristique principale. C’est un peuple de 186 figures qui
s’agite et se démène dans la terreur, dans l’angoisse et dans la
volupté, dégagé de toutes les contingences locales de la tragédie
Dantesque, comme un tableau tumultueux et poignant du jeu
des passions humaines que contemple de haut'la figure son-
geuse du Penseur.
La Porte a été longtemps l’œuvre de prédilection du maître. Il
s’en lassa plus tard, répudiant à juste raison les principes sur
lesquels il l’avait conçue. La « Porte est trop trouée » écrivait-il,
car il sentait trop tard l’erreur de ces saillies excessives. Aussi
parut-il la délaisser et ne plus s’en servir que comme d’un vaste
réservoir de formes où il puisa maintes inspirations ultérieures.
Cependant, dans les dernières années, il était revenu de ses
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préventions à l'égard de son œuvre, et il se préoccupait de sa
réalisation définitive en marbre et en bronze; elle ne tardera
pas à être obtenue, maintenant que la Porte est intégralement
dressée, si les amis de Rodin veulent bien s'en mêler.
En 1884, comme Rodin était en plein dans ce grand travail,
la ville de Calais mit au concours un monument en mémoire
de Eustache de Saint-Pierre. Rodin y prend part, présente, au
lieu d’une seule figure, le héros accompagné de ses cinq compa-
gnons d’infortune, obtient enfin le travail, non sans difficulté, et
y consacre dix ann ées cl’études et de labeur ; on trou ve ici, sans
conteste, le souvenir vivant des grandes œuvres chrétiennes et
émues de nos Cathédrales. Le monument fut inauguré en 1895,
non sans critiques amères et sans discussions passionnées.
En 1889, ce sera le tour du Claude Lorrain, qu’il entreprend
pour Nancy et où il est heureux de loger dans le socle les chevaux
du soleil se cabrant sous la conduite d’Apollon; car Rodin qui,
dans sa jeunesse, multipliait les croquis au marché aux
chevaux, avait toujours espéré trouver l’occasion de modeler en
grand des figures équestres. Il n’exécuta que celle du général
Lynch, pour l’Amérique du Sud. Le Claude Lorrain, avec son
jeune dieu ardent, fut aussi discuté que les précédents monu-
ments du maître. Le Victor Hugo, qui lui fut commandé la
même année, 1889, pour le Panthéon, n’eut pas de chance, lui
non plus. Il fut refusé par la Commission. Rodin avait
compris sa figure assise; architecturalement il fallait une figure
debout. Heureusement, le directeur des Beaux-Arts, Larroumet,
qui avait de l’esprit, résolut le problème. Il commanda le Victor
Hugo assis pour le Luxembourg — Dujardin-Beaumetz l’a
fait placer au Palais Royal — et il commanda pour le Panthéon
un Victor Hugo debout. Cette figure est achevée et ne demande
plus que son exécution en marbre.
En 1895, Rodin se mettait à l’œuvre pour une nouvelle com-
mande, un monument au grand patriote argentin, Sarmiento,
pour Buenos-Ayres. Il renouvelait sur le socle le mythe d’Apollon,
vainqueur du serpent Python, symbole limpide du rôle admirable
que joua dans son pays ce tribun clairvoyant qui rappelle notre
Gambetta. Cette conception radieuse ne fut pas sans soulever
des discussions ; ce fut le sort constant des travaux du maître.
Mais le plus grand scandale soulevé par ce génie qui affrontait
simplement les préjugés de l’opinion et les vieilles habitudes du
public fut celui que suscita, au Salon de 1898, l’apparition du
monument à Balzac, commandé par la Société des Gens de
Lettres. La Société refusa l’œuvre. Le président, Jean Aicard,
indigné de l’injure faite au maître, donna sa démission et le
Balzac retourna à Meudon, tandis que la commande passait à
Falguière, grand artiste, qui fut, cette fois, bien au-dessous de
la tâche.
On a souvent écrit que Rodin n’était pas un sculpteur monu-
mental. On peut voir, par cette suite, si cette critique est juste. Il
faudrait y joindre encore le projet pour le concours de la Défense
Nationale, destiné au rond-point de Courbevoie(1880) admirable
morceau, qui ne fut pas primé et dont Rodin a commencé le
grandissement, en cours d’exécution ci cette heure, de dimensions
colossales; le monument à Bastien-Lepage pour Damvillers
(1889); la décoration en cinq hauts reliefs pour la villa de
Mme Foa à Evian, exposée au Musée du Luxembourg en 1905,
puis le monument à Puvis de Chavannes, presque achevé avec la
collaboration du sculpteur Despiau; le monument à Whistler,
prêt pour la fonte. On pourrait ajouter, pour mémoire, un projet
auquel Rodin s’était passionnément intéressé durant quelque
temps et qui n’a reçu qu’une très partielle réalisation, c’est ce
qu’il appelait la Tour du Travail (1898). Ce monument au
Travail, la grande loi des temps modernes, le culte auquel, de
leur côté, Constantin Meunier et Dalou avaient voulu témoi-
gner leur dévotion par une conception analogue, comprenait
une tour en spirale, sur laquelle étaient tracées en bas reliefs
toutes les manifestations du travail, couronnée à la cime par
les Bénédictions. Ce groupe seul, deux figures culées, a été ter-
miné: Rodin avait compté sur une aide d’Amérique qui ne lui
vint pas.
A travers tous ces vastes ouvrages, Rodin a produit une
infinité de sujets indépendants, tels que : le célèbre Baiser en
marbte, au musée du Luxembourg, U Eve, /'Ariane, /'Orphée, la
Mort d’Alceste, l’Enfant prodigue, la Martyre, Bellone,/a Pensée,
Maternité, la vieille Heaulmière, Frère et Sœur, la Mort d’Adonis,
/'Illusion fille d’Icare, la Jeunesse Triomphante, le Printemps,
le Christ et la Madeleine, le Poète et la Muse, Pygmalion et
Galatée, Nymphe et Satyre, /'Amour et Psyché, les Songes de
la Vie, la Centauresse, /'Enthousiasme, Désespoir, Persée et la
Gorgone, et un grand nombre de faunesses et de nymphes,
reprises la plupart de la Porte de l’Enfer, témoignages pleins de
grâce voluptueuse et parfois poignante de son culte du corps de
la femme, résumé dans le groupe de /'Éternelle Idole.
En même temps, Rodin accomplissait une innombrable suite
de portraits qui, à eux seuls, suffiraient à faire la gloire d’un
grand artiste: ce sont les bustes de sa femme, Mme Rodin, qu’il
a traité à deux reprises différentes, de son patron Carrier.-
Belleuse, de ses confrères Dalou, Alphonse Legros, Puvis de
Chavannes, Jean-Paul Laurens, Falguière, Eugène Guillaume,
des deux amis qui le soutinrent de leur plume aux jours diffi-
ciles, Gustave Geffroy et Octave Mirbeau, de Victor Hugo,
Henri Rochefort, Henri Becque, du poète anglais Henley, de
Bernard Shaw, de George Wyndham, de lord Howard de
Walden, de Mrs Hunter, de Lady Sackville, de Lady Warwick,
car Rodin a travaillé beaucoup pour Londres, où il était très
apprécié, où il s’était rendu une première fois en 1881 à l’appel
de son ami Legros, et où il offrit, en 1914, au Victoria and Albert
Muséum un ensemble de dix-huit de ses chefs-d’œuvre en
hommage à la Grande-Bretagne venue au secours de la Belgique
outragée. Rodin a aussi beaucoup travaillé pour l’Amérique, il
a exécuté pour ce pays les bustes de M. Harriman, de Mrs
Simpson, de M. de Kay et de M. Ryan, qui a créé toute une
salle Rodin à Metropolitan Muséum de New-York. Les derniers
bustes de Rodin sont ceux du duc de Rohan, de Georges
Clemenceau, du pape Benoît XV, exécuté à Rome en 1915, et
— 13
enfin, de M. Étienne Clémente!, ministre du Commerce, le
dernier travail auquel Rodin ait mis la main, tous dignes des
plus beaux parmi les premiers.
L’œuvre de Rodin, on le voit, est considérable. Il faudrait y
joindre une profusion d’aquarelles, de dessins et de croquis, car
le maître dessinait constamment. Le musée Rodin en compte
environ 5,000 et il faudrait ajouter à ce chiffre tous ceux qui
sont en circulation, que Rodin a vendus et surtout qu’il a donnés.
C’est une existence extraordinairement laborieuse. Mais Rodin,
si sensible aux choses de la vie, si ouvert à tout ce qui se passait
autour de lui, si humain et si passionné\ avait une passion qui
dominait toutes les autres, celle du travail. On sait qu’il a aussi
beaucoup noté, beaucoup écrit sur son art, sur ses observations
et ses contemplations.
Cette belle existence si remplie ne fut guère coupée que par
quelques voyages en Belgique, pays si pleins de souvenirs pour
sa femme et pour lui, en Angleterre, où il avait tant d’amis et
surtout à Rome, qui fut une de ses patries intellectuelles de
prédilection. En 1902, il fut appelé à Prague pour une exposition
de ses œuvres. On le tenta d’accomplir un voyage en Amérique,
où il avait nombre d’admirateurs enthousiastes et, particulière-
ment, d’éleves; il ne put se décider à cette longue traversée. Il
regretta également toujours de n’avoir pas osé entreprendre le
voyage de Grèce.
En 1916, au mois de juillet, surmené par cet effort surhumain,
Rodin, frappé soudain par la maladie, devait s’aliter. Il se
remettait peu à peu, mais il renonçait à tout travail et se consa-
crait uniquement, avec la collaboration étroite du mandataire
qu’il s’était choisi pour la gestion trop lourde de son patrimoine
artistique, à l’accomplissement de son dernier rêve: l’achèvement
de ses travaux, la réalisation de l’ensemble de son œuvre et
l’organisation de ce musée Rodin, dont il avait fait si généreuse-
ment don à la France, avec toutes ses collections d’antiques, son
domaine de Meudon, ses droits d’auteur, dans un but d’ensei-
gnement. L’acceptation définitive par le Parlement fut ratifiée par
'4 -
la loi du 22 décembre 1916. Les derniers jours de Rodin s’écou-
lèrent très paisiblement. Son tempérament, jadis très combatif,
s’était apaisé. Le fonds bienveillant et affectueux de sa nature
lui faisait prendre un plaisir extrême à la société de ses amis, et
il accueillait avec gratitude et modestie tous les hommages qui
montaient de jour en jour plus nombreux vers lui. Il ne chercha
pas les honneurs, quoiqu’on en ait dit, car, dans la Légion
d’honneur, il ne parvint pas plus haut que le grade de grand
officier, comme ses confrères Mercié et Carolus Duran; l’Institut
l’avait oublié, mais il n’avait rien fait pour s’y préparer l’entrée.
A la veille de sa mort, une démarche, appuyée par vingt-sept
membres, fut entreprise, dans un but d’union, par Léon Bonnat,
accompagné de François Flameng et de Ch. Widor. Rodin, saturé
de gloire, aurait pu garder une attitude décourageante. Il jugea
avec bon sens que ce n’était pas le moment de se dérober à une
démonstration publique d’union entre tous les artistes et il pensa
avec finesse, car il était resté très malicieux, que ce serait la
confusion de ses ennemis qui avaient cru, justement, s’appuyer
contre lui sur l’Institut.
Sa femme était décédée le 13 février 1917. Sa cousine,
Mlle Henriette Coltat, aidée de temps en temps par sa sœur,
Mme Jacquart, vint la remplacer, filialement, près de lui. Il
ne quittait plus guère la Villa des Brillants, dominant la
riche vallée de la Seine, que pour se rendre, tous les diman-
ches, à l’Hôtel Biron et, de loin en loin, faire une petite
partie avec quelques amis, toujours heureux, souriant, recon-
naissant de toutes les marques d’affection qu’on lui prodi-
guait. Son riche tempérament avait repris le dessus, sa santé
paraissait rétablie lorsqu’une imprudence lui fit contracter un
refroidissement, dégénéré en pneumonie. Il expirait, entouré
de ses cousines, de l’ami qui signe ces pages et de son
infirmière, le 17 novembre 1917 à quatre heures du matin;
il était inhumé le 24, près de sa femme, dans l’enceinte de
la villa, devant la ruine du Château d’Issy, transformée
monumentalement, et sous la garde du Penseur.
Comme inspiration, Rodin a longtemps oscillé, ainsi qu’il
disait, entre l’influence de Michel-Ange et celle de Phidias,
mais pour revenir à la fin plus étroitement vers l’art grec
envers lequel il professait une véritable religion, s’entourant
de tout un vaste musée d’antiques. Mais il était curieux de
toute forme d’art, aussi bien de l’art extrême-oriental ou
mexicain que de l’ancienne Egypte, ou encore du XVIIP siècle
français, sans parler du Bernin qu’il s’était, félicité d’avoir
récemment découvert.
Son influence a été considérable. Nulle figure artistique
n’a été si populaire dans le monde entier, non seulement sur
le vieux continent, mais encore en Amérique et jusqu’au
Japon. Il a créé une sculpture à la fois plus plastique et plus
expressive, par un respect absolu et une compréhension péné-
trante, et restée constamment ingénue, de la nature et de la
vie. On ne peut vraiment le rattacher, dans le passé, qu'aux
grands maîtres du XVe siècle italien et ce nom de Rodin,
pour la postérité, deviendra sûrement aussi symbolique, pour
caractériser l’art de la statuaire moderne, que le sont, pour
les périodes du passé, les grands noms de ses maîtres de
prédilection : Phidias et Michel-Ange.
Léonce Bénédite.
.—
CATALOGUE
SCULPTURES
1. Rodin.
Buste exécuté par Paul Paulin, pendant l’été et
l’automne 1917. Il y en a trois états. Celui-ci est le
dernier. Rodin s’était beaucoup intéressé au travail
de son ami, avait posé avec beaucoup de patience et
avait marqué sa satisfaction en écrivant spontanément,
sur la base du buste, une dédicace affectueuse du
grand statuaire à son sculpteur. C’est, avec la photo-
graphie du présent catalogue, le dernier portrait du
maître.
2. Le Père Aymard.
Buste grandeur nature ; plâtre.
C’est le portrait du Supérieur des Eudistes, congré-
gation dans laquelle Rodin avait pris momentanément
les ordres, en 1863, dans un accès de désespoir causé
par la mort de sa sœur, décédée en décembre 1862.
C’est le deuxième ouvrage de sculpture connu du
maître.
Le bronze appartient au musée Rodin.
3. L’Homme au nez cassé.
Masque, grandeur nature; bronze.
(Musée du Luxembourg).
C’est le portrait d’un pauvre diable qu’on surnom-
mait « Bibi », et qui faisait tous les métiers dans le
quartier Saint-Marcel, où habitait alors Rodin.
Ce buste a été exécuté en 1864. C’est le troisième
ouvrage de sculpture connu du maître. 11 fut présenté
et refusé au Salon de 1864 et reçu plus tard, en
marbre, au Salon de 1875, sous le nom de M. B...
Des répétitions de ce masque figurent dans nombre
de musées d’Europe et d’Amérique.
L’Age d’airain.
Figure un peu plus grande que nature ; plâtre.
Modèle de la célèbre statue dont l’original en
bronze figure au musée du Luxembourg. Elle fut
exécutée à Bruxelles, comme une libre mais conscien-
cieuse étude sur nature, d’après un soldat télégra-
phiste belge, Auguste Neyt, qui posa comme modèle
et devint l’ami du maître. Cette figure fut exécutée
exactement d’octobre 1875 à mars 1877. Elle fut
exposée en plâtre au Salon de 1877 et occasionna un
incident qui a été rapporté par tous les historiens du
maître. Rodin était alors inconnu. Cette façon si
intelligente de pénétrer les modelés les plus subtils
d’un corps humain surprit à tel point qu’on accusa
l’auteur d’imposture, en déclarant qu’il n’avait pu obte-
nir ce résultat que par des moulages directs sur la vie.
Rodin dut faire mouler le torse du modèle et le
faire photographier sur toutes les faces pour prouver
sa bonne foi.
Un groupe de statuaires, cependant, parmi lesquels
il faut compter Falguière, Paul Dubois, Alfred
Boucher et autres portèrent une protestation à l’admi-
nistration des Beaux-Arts.
L’Etat, comme compensation à l’artiste, fit, en
1880, l’acquisition du bronze exposé au Salon et qui
fut placé dans le jardin du Luxembourg jusqu’en
1890, date à laquelle on le fit entrer dans le Musée.
Des répétitions de ce premier chef-d’œuvre du
maître se trouvent dans diverses grandes collections
publiques, notamment en Angleterre et en Amérique.
5. Saint Jean-Baptiste.
Un peu plus grand que nature ; plâtre.
Modèle de la statue en bronze, originale, exposée
au Musée du Luxembourg et qui a figuré en plâtre
au Salon de 1880 et en bronze à celui de 1881 et au
Salon triennal de 1883. Rodin avait d’abord exposé
au Salon de 1879 le buste seul, en plâtre galvanisé
par Danielli.
6. L’Homme qui marche.
Plus grand que nature ; plâtre.
Etude pour le Saint Jean-Baptiste (1880).
Le bronze de cette grande étude célèbre est placé
dans la cour du palais Farnèse, à Rome. Le plâtre a
été exposé au Salon de 1907.
7. Les Bourgeois de Calais.
Groupe de six personnages, plus grands que nature ; plâtre.
Reproduction du Monument érigé par la ville de
Calais.
En 1884, la ville de Calais mit au concours un
monument en mémoire du sacrifice patriotique
d’Eustache de Saint-Pierre. On connaît l’épisode
rapporté par Froissart et Jean Le Bel. La ville de
Calais (1346-1347), après un siège de onze mois,
réduite aux dernières extrémités, dut faire sa sou-
mission au roi d’Angleterre, Edouard III. Le souverain,
exaspéré par les pertes subies et les longueurs du
siège, exigea que six des plus notables bourgeois de
la ville vinssent faire leur soumission, « lesquelz
viendront par devant moy en pures et simples che-
mises, la hart au col et m’apporteront les clefs de la
ville et ferons d’eux notre pure volonté. » (Jean Le
Bel). En vérité, le roi Edouard se montra clément.
Le concours établi par la ville de Calais ne com-
portait qu’une figure, celle d’Eustache de Saint-
20
Pierre. Frappé par le récit du vieux chroniqueur
Rodin conçut l’exaltation des six tristes otages : Jean
d’Aire, Jacques et Pierre de Wissant, Jean de Fiennes
et André d’Ardres qui accompagnaient Eustache.
Ce travail lui donna beaucoup de soucis et l’occupa
dix années. 11 ne fut inauguré qu’en 1895; Rodin
éprouva de nouveau sur ce groupe les tristesses de
l’incompréhension de ses contemporains, comme il
les subit pour l'Age d’airain, et ultérieurement pour
le Balzac.
Rodin avait, primitivement, conçu ce groupe, mêlé,
sur le sol, devant l’hôtel de ville de Calais, à la foule
même et se rendant en procession au camp anglais.
Il renonça à cette idée qui ne pouvait être comprfse
alors et adopta le groupement actuel.
Ce monument est érigé sur une place de Calais. Il
est également élevé, à Londres, par les soins d’un
Comité anglais, près du Palais de Westminster et
dressé à une assez grande hauteur.
Tous les personnages ont été réduits en figurines
par Rodin.
8. Le Baiser.
Petit groupe ; bronze. - Appartient à Mm* J...
Ce groupe, primitivement intitulé la Foi, avait été
conçu originairement pour figurer dans la Porte de
l’Enfer, où il représentait l’épisode de Paolo Mala-
testa et Francesca da Rimini, que Rodin a repris
plusieurs fois.
9. Le Baiser.
Groupe plâtre, plus grand que nature.
Grandissement, avec modifications, du sujet pré-
cédent. Moulage sur l’original en marbre, du Musée
du Luxembourg, qui a figuré au Salon de 1898.
10. Le Penseur.
Figure assise, demi-nature ; bronze.
C’est la figure, dans sa dimension originale, qui
domine du haut du tympan, dans son attitude médi-
tative, toute la tumultueuse tragédie qui se déroule
sur les montants et sur les vantaux de la Porte de
l’Enfer.
11. Le même.
Réduction de dimensions inférieures ; bronze. - Appartient à M. Danthon.
12. Le Penseur.
Grandeur double de la nature; plâtre.
Salon de 1904.
C’est le grandissement en dimensions colossales de
la figure précédente; elle est placée, depuis 1906,
comme on sait, en avant des marches du Panthéon, à
Paris, par suite d’une souscription publique. Elle
domine également le monument funéraire du maître,
dans l’enceinte de sa villa des Brillants, à Meudon.
11 existe également des répétitions du Penseur en
Amérique, notamment dans le parc de San Francisco.
13. Le premier Homme, ou Adam.
Statue plus grande que nature ; plâtre.
Statue exécutée au retour du premier voyage de
Rodin, à Rome et à Florence (1875), et sous l’inspi-
ration directe de Michel-Ange, comme la plupart des
figures de la Porte de l’Enfer, et par suite comme la
suivante. Salon de 1882.
Accompagne, ainsi que celle-ci, la figure du Penseur
dans la décoration du monument funéraire du maître,
à Meudon.
■22
14. Eve.
Statue grandeur nature ; plâtre.
L’original en bronze figure au Musée du Luxem-
bourg.
Salon de 1899.
(Voir dans : Rodin, l’Art, entretiens réunis par
Paul Gsell, ce que Rodin raconte au sujet de son
travail sur cette statue).
Ces deux figures avaient été primitivement conçues
pour accompagner la Porte de l’Enfer et sont de la
même date.
15. Eve.
Statuette demi-nature ; bronze. — Réduction du sujet précédent.
Collection de M. Desèvres.
16. L’Ombre.
Statue plus grande que nature ; plâtre.
C’est une dés trois figures, grandies, qui se dres-
sent sur le couronnement de la Porte de l’Enfer et
semblent répéter le vers célèbre du grand Gibelin :
« Lasciate ogni speranza, voi che’ntrate »
Une réplique de cette statue, comme pour la pré-
cédente, accompagne la figure du Penseur dans le
monument funéraire du maître, à Meudon.
17. Balzac.
Figure plus grande que nature ; plâtre.
C’est une commande de la Société des Gens de
Lettres qui refusa ensuite le modèle de Rodin, exposé
au Salon de la Société Nationale, en 1898, en même
temps que le Baiser. Ce fut le scandale artistique de
de l’année. La commande fut passée à Falguière.
Rodin, cependant, avait mis un soin tout particulier
à l’élaboration de cette œuvre. Peu d’ouvrages lui
donnèrent autant de souci; il fit de nombreuses
recherches, même sur la vie.
— 23
13. Balzac.
Étude préalable pour le sujet précédent, grandeur nature ; plâtre.
Appartient à M. Danthon.
19. Balzac.
Buste en bronze. Répétition du précédent.
Appartient à M. Danthon.
20. Balzac.
Masque ; plâtre teinté.
Etude préliminaire pour le monument précédent.
21. Ugolin.
Petit groupe ; plâtre.
C’est un sujet emprunté à un épisode célèbre de
l’Enfer, de Dante, et faisant partie de la Porte de
l’Enfer.
Rodin en a fait un agrandissement qui a reçu deux
versions.
22 L’Appel aux Armes.
Groupe demi-nature ; plâtre.
Appelé aussi par Rodin la Défense. Et c’est, en
effet, un projet pour le concours organisé en 1880
pour le monument de la Défense, destiné au rond-
point de Courbevoie. Rodin ne fut pas primé.
23. La Méditation ou la Muse des Voix intérieures.
Statue : plâtre.
Cette figure, à laquelle il manque certaines parties,
parce qu’elle s’adapte au monument de Victor Hugo
assis, première pensée pour le Panthéon, est une
reprise et un grandissement d’une petite figure qui
appartient au tympan de la Porte de l’Enfer. Comme
on le voit, la Porte, après coup, a été pour le maître
lin vaste réservoir de formes et d’idées plastiques.
La Méditation est accompagnée, dans le monument,
de la Muse tragique.
— 24 —
24. La Martyre.
Figure couchée, grandeur nature ; bronze.
C’est, reprise en grandeur nature et complétée,
d’une des figures de la Porte de l’Enfer, dont on
trouve ici le petit buste sous le n« 68.
25. L’Enfant prodigue.
Statue petite nature ; plâtre.
Appelée aussi : La Prière.
Cette figure pathétique est empruntée à la Porte
de l’Enfer. Rodin vivait avec les figures de ses
créations comme un Balzac avec les personnages de
ses romans. Il les appliquait à toutes sortes de rôles
imprévus qui en faisaient comme des figures dis-
tinctes et dissemblables. Ainsi l’Enfant prodigue est
le même personnage qu’une figure de la Porte, qui
est portée sur le dos d’une damnée. Ce groupe,
retourné, a donné le groupe Fugit amor. (Voir le
no 40). La tête, prise à part et grandie, est devenue
la Douleur.
26. Orphée.
Statue, plâtre.
Figure détachée d’un groupe formé de cette statue
et de celle d’Eurydice ou de la Muse, qui le domine
en volant.
La figure de la Muse est une reprise, modifiée, de
la Martyre. (Voir no 24).
Exposé au Salon de la Société Nationale en 1908.
27. La Femme accroupie.
Figure grandeur nature ; plâtre.
C’est la reprise, grandie, d’une petite figure
exécutée primitivement pour la Porte de l’Enfer et
qui représentait la Luxure.
Le bronze est exposé au Musée du Luxembourg.
— 25 —
28 Bellone.
Buste plus grand que nature ; bronze.
Appartient à M. Rudier.
Ce buste décoratif a été exécuté en 1883, d’après
Mme Rodin, qui avait posé pour le masque. Le
bronze figure également au Musée du Luxembourg.
29 Torse de Femme.
Grandeur nature ; bronze.
Musée du Luxembourg.
Exposé au Salon de la Société Nationale en 1890.
30. Les Sirènes.
Petit groupe ; plâtre.
Ce petit groupe, dans une proportion minuscule,
fait partie de la Porte de l’Enfer. 11 a été grandi par
le maître à la dimension du présent groupe et grandi
encore pour devenir plus tard les Voix de la Mer dans
le monument à Victor Hugo, destiné au Panthéon.
31. La Vieille Heaulmière.
Figurine ; bronze.
Titre emprunté à la ballade de Villon. Etude de
vieille femme qui se trouve répétée en bas-relief dans
le montant gauche de la Porte de l’Enfer.
Rodin en a exécuté anciennement une figure
grandie à la demi-nature, en marbre.
(Musée du Luxembourg).
32. La Cariatide tombée.
Figure accroupie portant sur la tête sa pierre ; bronze.
Petite figure empruntée à la Porte de l’Enfer,
exposée en pierre de France au Salon de la Société
Nationale en 1897. Rodin en a fait exécuter un agran-
dissement plus grand que nature.
(Musée du Luxembourg).
2Ô —
33. Désespoir.
Petite figure assise, tenant son pied gauche dans ses mains ; bronze.
Appartient à M. Danthon.
Figurine détachée, puis reprise, de la Porte de
l’Enfer.
34.
Fragment d’un montant de la Porte de l’Enfer.
Bas-relief ; bronze.
(Musée du Luxembourg).
35. Frère et Sœur.
Petit groupe ; bronze.
Exécuté eu 1890.
Appartient à M. Danthon.
36. « Je suis belle ».
Petit groupe ; plâtre.
C’est le titre donné par Rodin à ce groupe d’un
homme qui élève une jeune femme à la hauteur de
ses lèvres pour l’embrasser.
La figure de l’homme, que le maître a reprise et
complétée, appartient à la Porte de l’Enfer; il a
exécuté également, d’après elle, un Marsyas et
l’Homme au Serpent, de la collection Antony Roux,
exécuté en 1885.
37. La Main de Dieu.
Petit groupe ; bronze.
La main de Dieu, créant la femme. Rodin a repris
ce sujet en marbre.
(Musée du Luxembourg).
38. Le Sculpteur et la Muse.
Groupe demi-nature ; bronze.
Appartient à M. Danthon.
— 2
/
39. Centauresse.
Petite figure ; plâtre.
Rodin a dessiné et modelé nombre de figures de
centaures et de centauresses, car il avait toujours
aimé traduire les formes du cheval. Il avait toujours
rêvé la commande de statues équestres. Il n’en a
exécuté qu’une : celle du général Lynch, pour l’Amé-
rique du Sud.
Dans la première édition de la Porte de l’Enfer,
qui est montée à Meudon, figurent deux bas-reliefs
de centaures et de centauresses.
Le marbre, un peu plus grand, de cette figure,
appartient au Musée Rodin.
40. Fugit amor.
Petit groupe ; plâtre teinté.
Voir l’observation faite au sujet de l'Enfant pro-
digue, groupe emprunté à la Porte de l’Enfer, mais
retourné, exécuté vers 1898.
41. La Douleur.
Buste grandeur nature; plâtre.
Voir l’observation faite à propos de Y Enfant pro-
digue et de F agit Amor.
Le bronze est au Musée du Luxembourg.
42. Tête coupée de Saint Jean-Baptiste.
Plâtre.
Le marbre appartient au Musée Rodin et le bronze
au Musée du Luxembourg.
Exécuté en 1887, sous l’influence persistante de
l’art italien du XVe siècle, subie fortement par le
maître lors de son premier voyage à Rome en 1875.
28
43. Faune et Nymphe.
Petit groupe ; bronze.
Rodin appelait également cette composition : le
Minotaure. Il l’a reprise, en une dimension un peu
plus grande, en marbre.
(Musée du Luxembourg).
44. La Pleureuse.
Masque petite nature ; plâtre.
C’est un masque en forme de mascaron qui décorait
primitivement, avec un pendant analogue, le bas d’un
panneau de la Porte de l’Enfer. A été supprimée dans
la nouvelle édition que Rodin fit de sa Porte.
45. Danaïde.
Petite figure; plâtre.
Appartient originairement à la Porte de l’Enfer.
Le marbre original est au Musée du Luxembourg.
46. Faunesse debout.
Figurine; bronze.
Collection de M. Desèvres.
Cette petite figure est détachée du tympan de la
Porte de l’Enfer.
47. Faunesse à genoux.
Figurine : bronze.
Collection de M. Baillehache.
Cette petite figure est détachée, comme la précé-
dente, du tympan de 'a Porte de l’Enfer.
29 —
48 Jean-Paul Laurens.
Buste grandeur nature ; plâtre.
Le bronze original appartient au Musée du Luxembourg.
Exposé au Salon de 1882.
Jean-Paul Laurens, né à Fourquevaux (Haute-
Garonne), en 1838, membre de l’Académie des
Beaux-Arts, peintre d’histoire, auteur de vastes déco-
rations au Panthéon, à l’Hôtel de Ville de Paris, au
Capitole de Toulouse, etc. Grand ami de Rodin.
49. Dalou (Jules).
Buste grandeur nature ; bronze exécuté en 1885.
Jules Dalou (1838-1902), célèbre statuaire, ami de
Rodin, auteur du Triomphe de la République, place
de la Nation ; du Mirabeau devant le marquis de
Dreux-Brézé, haut relief à la Chambre des Députés ;
du Triomphe de Silène, au Jardin du Luxembourg;
du monument de Delacroix, de celui de Victor Noir,
etc., etc. Camarade d’école de Rodin, à la “ Petite
École ” de dessin et de mathématiques.
Exposé au Salon de 1884.
Le bronze est au Musée du Luxembourg et au
Musée Rodin.
50. Puvis de Chavannes (Pierre-Cécile)—1824-1898.
Buste grandeur nature; bronze.
C’est le grand artiste qui a illustré de ses immor-
telles décorations le Panthéon, les Musées de Mar-
seille, de Poitiers, d’Amiens, de Lyon et de Rouen,
l’Hôtel de Ville de Paris, la Bibliothèque de Boston,
etc. Rodin professait pour ce maître une profonde
admiration et une vive amitié.
Exposé au Salon de 1891, en plâtre, et de 1892, en
marbre.
Le bronze se trouve au Musée du Luxembourg et
au Musée Rodin. Le marbre au Musée de Lyon et au
Musée d’Amiens.
3o —*
51. Rochefort.
Buste plus grand que nature ; plâtre.
Victor-Henri de Rochefort-Luçay (1830-1913), publi-
ciste et pamphlétaire célèbre.
Buste exécuté en 1892.
Le buste figure au Musée du Luxembourg. C’est la
reprise amplifiée du buste grandeur nature.
Le marbre de ce buste a passé récemment à la
vente de Rochefort et a été racheté par la famille.
52. Gustave Geffroy.
Buste grandeur nature ; plâtre.
Gustave Geffroy,célèbre critique d’art et romancier;
membre de l’Académie Goncourt. Un des premiers
qui ont défendu l’œuvre de Rodin dans les jours
difficiles.
Le bronze de ce buste est placé au Musée du
Luxembourg.
53. Octave Mirbeau.
Buste; plâtre.
C’est le buste de l’écrivain célèbre, publiciste et
romancier, né en 1850, mort en 1917, qui fut un des
premiers défenseurs et des plus ardents hérauts de la
gloire de Rodin.
Exposé, en bronze, au Salon de 1895.
54. Berthelot.
Buste grandeur nature ; plâtre.
Le bronze est placé au Musée du Luxembourg.
Marcelin Berthelot, illustre savant français dans
l’ordre des sciences chimiques et philosophiques,
secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences,
membre de l’Académie Française, sénateur, puis
ministre.
Né en 1827, décédé en 1907.
55. Le duc de Rohan.
Buste ; plâtre.
Le buste en marbre a été exposé au Salon de la
Société Nationale en 1911.
Le bronze figure au Musée du Luxembourg.
56. Lord Howard de Walden.
Buste; bronze.
Une répétition est placée au Musée du Luxem-
bourg, 1911.
57. Le Pape Benoît XV.
Buste; plâtre.
Ce buste a été exécuté à Rome en 1915. Le Souve-
rain Pontife avait accordé au statuaire trois séances.
Rodin ne put le conduire au point où il le voulait,
mais cet ouvrage, qui est son avant-dernier, le dernier
est le buste de M. Clémentel, ministre du Commerce,
peut compter parmi ses bustes les plus expressifs.
58 Mme Rodin.
Buste grandeur nature ; plâtre.
Buste exécuté vers 1875.
Marie-Rose Beuret, née en 1845, qui a posé pour
divers travaux du maître, notamment pour la tête de
la Bellone (V. no 28), décédée en février 1917.
59. Mme Russel.
Buste; plâtre.
C’est un portrait dont Rodin s’est servi à maintes
reprises pour des bustes de Minerve, Minerve cas-
quée, Minerve couronnée du Parthénon, etc.
Exposé en argent au Salon de 1890.
-- 32 —-
60. Mlle Camille C...
Buste grandeur nature ; plâtre teinté.
61. Buste décolleté de Mme N...
Demi-nature ; bronze.
62. Tête de jeune Fille, les cheveux pendants.
Demi-nature; bronze.
63. Tête de jeune Femme, les yeux fermés, rejetée en
arrière avec un accent de douleur.
Demi-nature ; bronze.
64 Tête d’Enfant riant.
S
Demi-nature; bronze.
65. Masque de jeune Femme.
Petite nature ; bronze.
66. Génie funéraire.
Tête demi-nature ; bronze.
Tête du modèle, grandi, qui a servi au monument
de Puvis de Chavannes.
67. Madame S...
Petit masque de femme ; portrait demi-nature ; bronze.
68. Buste de jeune Femme, les yeux clos.
Demi-nature ; bronze.
Fait partie d’un groupe de damnées dans la Porte
de l’Enfer.
33
69. Anako.
Masque grandeur nature ; bronze.
C’est le visage d’une jeune danseuse japonaise que
Rodin a modelé un certain nombre de fois et d’après
laquelle il a exécuté divers dessins.
70. Anako.
Petite tête, réduite, de la danseuse japonaise ; plâtre.
71. Enfants jouant.
Petit groupe ; plâtre.
Rodin a exécuté beaucoup de sujets d’enfants,
notamment dans ses décorations de vases de Sèvres,
dans ses pointes sèches du Printemps et de la Ronde
des Amours et surtout dans les décorations sculptu-
rales qu’il a exécutées pour la décoration de la villa
de Mme Foa, à Evian.
72. Polyphème.
Figurine; bronze.
Petite figure d’ombre, appelée par Rodin Poly-
phème et qui faisait partie de la Porte de l’Enfer.
73. Trois Nymphes dansant.
Petit groupe; plâtre.
C’est une composition formée avec une figure
empruntée en triple exemplaire à la Porte de l’Enfer
et que Rodin appelait familièrement “ la petite Bre-
tonne ”, probablement d’après le modèle qui avait
posé pour ce sujet.
- 34 -
74. L’Emprise; Faune et Faunesse.
Pei grcupe; plâre.
75. Torse d’Homme assis.
Peie figure-, plâre.
76. Petite Nymphe debout.
Figurine ; plâre.
77. Groupe de deux Nymphes.
Pei es figurines -, plâre.
78. Mercure.
Pet e figurine ; plâtre.
79. Etude de Femme nue, sans tête.
Demi-nature ; plâtre.
Etude d’après un modèle, Mme Abruzzesi, qui a
posé pour divers sujets de la Porte de l’Enfer. Rodin
en a exécuté un agrandissement à l’échelle plus
grande que nature.
80. Petite Nymphe.
Figurine; plâtre.
81. L’Ombre
Petite figurine d’homme debout ; plâtre.
82. Deux petites Nymphes assises.
Figurines ; plâtre.
82 bis. Étude par un Baiser.
Petit groupe ; bronze.
Kunsthaus Zurich / Bibliothek
iiiiiii ni mi ni mil lllll II II ni mi mu ni ii
17600037117
35
AQUARELLES ET DESSINS
83 à 143.
POINTES SÈCHES
144. Bellone.
145. Victor Hugo, de trois quarts
146. Victor Hugo, de face
147. Henri Becque
148. Auguste Rodin plâtre
Buste exécuté par Paul Paulin en 1917.
149. Photographie de l’ensemble de la Porte de l’Enfer.
À VENDRE
Nos 28, 83, 84, 85, 86.
À CORRIGER
N° 1. Torse de femme; plâtre (au lieu de «Rodin»)
N° 10. Le matériel de cette figure est plâtre (au lieu de «bronze»).
N° 28. Tête de Saint Jean-Baptiste; bronze,
(au lieu de «Bellone»)
N° 33. Buste de femme; bronze
(au lieu de «Désespoir»)
N° 60. Buste ; plus petit que nature
(au lieu de «grandeur nature»)
N° 72. Même note qu’au N° 10.
Nos 73, 81 et 82bis
manquent.
.5-
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