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ÇA IRA !
18 e siècle. Elle possède une littérature appré
ciée partout, et qui est un sûr garant contre
une trop rapide décadence. Jusqu'ici le fran
çais fut la langue diplomatique par excellence,
en somme une espèce de langue internationale
déjà. De plus, la plupart des étrangers qui
apprennent un second idiome étudient de préfé
rence le français, et cela seul leur épargnerait
une étude que plusieurs trouveraient fastidieuse.
L’anglais présente également de grands
avantages, surtout pratiques, dont le plus
important est la grande facilité et l’extrême
richesse de l’idiome, qui se trouve à cheval
sur les langues germaniques et romanes.
L’anglais, si simple, est déjà parlé dans le
monde entier : il n’y aurait qu’un très petit pas
à faire pour le sacrer “ langue universelle „.
Disons un mot également d’une troisième
langue internationale qui pourrait avoir voix
au chapitre, et qui est le chinois. Les idéo
grammes chinois sont lus par huit cents millions
d’êtres humains, dont plus de quatre cents
millions connaissent le chinois pur. La langue
est difficile, mais son étude est un merveilleux
instrument de culture. Mais n’insistons pas :
l’idée du chinois langue universelle est trop
jeune encore : d’aucuns se moqueraient.
Nous ne restons donc qu’en présence de la
langue française et de l’anglaise. Nous ne
voulons guère décider laquelle des deux doit
l’emporter sur l’autre, encore que l’anglais
paraisse avoir le plus de chances. Nous nous
réservons, d’ailleurs, de revenir sur la question
lorsqu’elle sera devenue d’un intérêt plus
immédiat.
Sans doute, on nous traitera de réactionnaire,
parce que nous n’avons pas clamé la supériorité
d’une des nombreuses langues artificielles.
Tant pis : nous avons tenu à dire notre pensée
à ce sujet, avec la même sincérité que nous
apportons dans toutes les questions que nous
traitons. Jacques LOTHAIRE.
Un Tract
“ Aurons-nous la Révolution ? ”, c’est
la question qui s’étale en grosses lettres
noires sur la couverture d'une brochure
que les Editions de La Sirène viennent
de publier dans leur Collection des
Tracts. Avec un tel titre, ce petit volume
est assuré d’un succès sans précédent,
car voici de longs mois que cette
angoissante question s’est imposée,
d’abord furtivement, bientôt de façon
impérieuse, à une infinité de cerveaux
inquiets. Pas un, parmi nos capitalistes
d'Occident, qui, à certaines heures de
défaillance, n'ait vu s'éclipser sa belle
sérénité et n’ait laissé envahir la paix
de son âme par l’obsédante menace
d'une Révolution sanglante. Le spectre
horrible du bolchéviste, aux mains
dégouttantes de sang, un poignard
entre les dents, s’est dressé devant ses
yeux ; d’atroces visions de meurtres et
de rapines ont troublé ses nuits et petit
à petit un intolérable malaise est venu
lui gâter la paisible jouissance de ses
richesses.
Aussi sera-ce avec une avide impa
tience qu’il se jettera sur ce petit livre et
qu’il y cherchera des perspectives
propres à le délivrer de sa cruelle
incertitude.
Qu’y trouvera-t-il ?
Tout d’abord, une impartialité absolue
dans l’exposé du problème — impar
tialité qui est rendue plus tangible par
la forme sous laquelle le document se
présente. En effet, l’auteur a voulu
garder l’anonymat et il a donné à son
ouvrage l’apparence d’un rapport rédigé
par un imaginaire agent d’ambassade
à l’intention d’une “ Excellence ” tout