ÇA IRA ! 85
. Paysagiste hors-ligne, aimant surtout l'heure
matinale, toute d'or et de soleil, de sa Provence.
Ses toiles : Port de Cassis ; Allauch ; les roches ;
sont d'un coloris intense et émouvant. Ses
dessins probes et très lumineux, dénotent un
oeil observateur et une âme qui comprend. On
peut dire de ces deux maîtres, Verdilhan et
Audibert — deux amis — qu'ils peignent parce
que la “ terre est belle „ selon la délicate
expression de notre nouveau confrère, .Léon
Franc (qui s'est chargé de la chronique de
Provence) à qui nous souhaitons une cordiale
bienvenue.
Paul Dupré. — Peintre consciencieux. Pré
fère le crépuscule, tout bleu, là-bas, à la pleine
lumière. Un aquarelliste. Il relève ses aquarelles
par de gros traits de fusain, et forme ainsi un
ensemble très harmonieux et très évocateur.
Mlle Pastit. — Marseillaise pur sang ; a peint
de belles toiles (Allauch ; environs de Marseille,
etc.). S'est essayée aussi à des ultra-fantaisies.
Les “ Petits Provençaux — Une bonne
dizaine d'artistes — pas des maîtres — se sont
mis en tête d'exposer des tableautins, à peine
grands comme des cartes illustrées. Cette
exposition, intitulée gravement les “ Petits
Provençaux „ est des plus banales, et connait
un grand succès, à Marseille. D'ici de là, un
tableautin qui plaît.
E. Laget (Arles). — Au seuil d'une boutique,
située face aux Arènes, à Arles, apparaît
l'artiste. Homme charmant, plutôt timide, jeune
encore ; de suite, l'œil est attiré par la lumière
vive et colorée de nombreuses aquarelles.
Etienne Laget aime sa ville comme pas un.
Ses aquarelles, ses dessins dépeignent Arles
dans toute sa beauté grave et antique.
Si jamais vous passez par Arles, entrez au
“ Païs d'Arle ,, vous y trouverez un charmant
causeur, un artiste. Jean KAROL.
Chronique de Provence
Marseille, mai 1920.
Qu’au lendemain des rouges années, la
jeune Belgique s'intéresse à notre Provence,
cela m’émeut mais ne me surprend point. J’ai
toujours été frappé par ce qu’il y a de méditer-
rannéen dans l’art belge : Jyrisme voluptueux,
sensualité soleilleuse.
Quelles affinités entre ces deux grands
poètes, votre Verhaeren et notre Mistral !...
Au début de cette première chronique,
aimablement demandée, on me pardonnera de
ne pouvoir m’empêcher, nonobstant la place
mesurée, de joindre ces deux noms.
Hélas ! la Provence se lamente encore sur
la tombe de celui qui la réveilla.
Nos théâtres d’Orange, de Béziers, de Car
cassonne, l’Athéna-Niké de Marseille, où
sonnaient les résurrections, sont encore muets ;
mais, déjà, le frémissement dionysiaque anime
notre Provence et la redresse. Elle va se
baigner dans l’eau de ses calanques, lisser ses
cheveux et chanter.
Nous saluerons bientôt, je l’espère, le réveil
d’Orange, déjà Béziers s’apprête...
Emile Ripert qui a voué un culte pieux au
Maître, s’emploie avec ferveur, par ses
ouvrages d’érudition, par la parole aussi, dans
les chaires d'Aix et de Marseille, à faire con
naître l’œuvre, le temple ainsi que disait
Mistral :
„ Soun mort li bastisseire
„ Mais lou temple es basti ”
Dans " la Renaissance Provençale ” (Cham
pion & Dragon, éditeurs, Paris-Aix) Emile
Ripert a étudié l’œuvre des précurseurs ; des
troubadours au félibrige.
La “ versification de Frédéric Mistral ”
montre encore la ténacité et le talent avec
lesquels Emile Ripert sert l’idéal de tous les
intellectuels méditerranéens.
■NPS