UN DEVOIE DE STYLE
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D’ailleurs, le gilet est « perdu ». Les hommes
dont c’est le métier infortuné d’écrire frot
tent toujours leur poitrine à la même place
contre leur table de travail, et il en résulte
une déplorable usure qui laisse une barre
blanchissante sur la couleur de l’étoffe.
Ainsi, littéralement, je n’ai plus rien à
me mettre. Je ne saurais me présenter
décemment chez aucun de mes conci
toyens. Cette question du vêtement, pour
les personnes qui ne sont ni des million
naires ni d’heureux prolétaires conscients,
devient un douloureux problème. Aux dé
buts de la guerre, je n’ai pas renouvelé
ma garde-robe, bien que les prix fussent
encore abordables « parce qu’on ne savait
pas ce qui allait arriver, et qu’il était sage
de faire des économies ». Et puis la guerre
a duré. Alors, je suis allé chez mon tail
leur — un petit tailleur — qui avait cou
tume de me faire payer un « complet »
140 francs. 11 m’en a demandé deux cents.
J’ai reculé. « Ça finira bien par finir, pen-