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MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX
avait daigné me donner, mon compagnon
rougit, et se tut.
— ... D’autant plus, suggéra l’un des
guerriers, qu’il y a aussi des chevaux, si
l’on voulait atteler les carrioles. Tenez, pas
bien loin, il y a le dépôt des chevaux...
Même qu’il y en a qu’on a pris aux Boches.
Allez-y voir, si vous voulez.
Les chevaux vivent d’herbe, à l’état
sauvage. A l’état civilisé, ils en feraient
volontiers autant. Mais, comme on ferre
leurs sabots, quand ils sont parqués dans
un espace trop étroit ils ne tardent pas à
transformer cette herbe en une fange
épaisse, où ils ont l’air très malheureux.
Un de ces coursiers leva vers nous cet œil
d’antilope, tendre et caressant qui révèle,
malgré le poil mal soigné, la crinière em
mêlée, le cheval de race.
— Ça, c’est un Boche ! observa l’un des
guerriers. Et je ne sais pas ce qui lui prend,
toutes les fois qu’on passe près de lui, il a
une si drôle de manière de gratter du pied !