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MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX
la rage, de la folie dans sa peur : pour un
cri si c’est un bipède, comme vous et moi,
pour une mouche qui les pique ou un mor
ceau de papier, si c’est des bêtes à quatre
pattes, avec une crinière et des sabots. Les
autres animaux, les autres hommes se figu
rent qu’il sait, celui-là, pourquoi il fiche
le camp, et ils suivent. Ce qu’on n’explique
pas, c’est que, à d’autres moments, ils res
tent au contraire bien tranquilles, ils lais
sent le premier imbécile passer sa folie tout
seul. Pourquoi, alors, est-ce contagieux,
le jour suivant, ou le mois, ou l’année
d’après ? Pourquoi les cervelles ont-elles
toutes la même idée, la même impulsion,
au lieu de continuer à raisonner à part ?
Ça, on n’en sait rien. Moi, j’ai remarqué
que les chevaux, ça leur vient surtout après
de grandes fatigues, qui ont duré plusieurs
jours, et quand on a commencé à leur don
ner du repos, et de l’avoine. Ils sont éner
vés et excités tout à la fois. Pour les hom
mes, c'est peut-être la même chose. En