Full text: Mémoires d'un Dada besogneux de l'armistice a 1925

DEUX SOLITAIRES 177 
12 
curait du travail, surtout on pensait à 
elles, on le leur montrait ; et, voyez-vous, 
l’homme — ni la femme — ne vit pas seu 
lement de pain ; il a besoin de savoir qu’on 
est là près de lui, qu’on le regarde, qu’on 
le plaint. Autrement, c’est la solitude : on 
meurt de solitude comme on meurt de 
faim ; et c’est peut-être encore plus triste. 
Mais ces deux-là, cette vieille veuve et sa 
tille infirme, sa tille aux jambes paralysées 
depuis son enfance, depuis que jadis on 
l’a envoyée à Berck, avec les pupilles de 
la ville de Paris, deux ans de suite, et sans 
résultat ! Comment ont-elles vécu, pendant 
ces cinquante-deux mois, et comment peu 
vent-elles continuer à vivre, à cette heure 
où tout est si cher ? Elles n’ont jamais 
touché « l’allocation », elles ne pouvaient 
pas aller aux usines. La mère ne veut pas 
quitter sa tille, cette pauvre invalide qui 
va aujourd’hui sur ses vingt-cinq ans, et 
qui demeurera infirme jusqu’au jour de 
sa mort. Elles ont même dû continuer à
	        
Waiting...

Note to user

Dear user,

In response to current developments in the web technology used by the Goobi viewer, the software no longer supports your browser.

Please use one of the following browsers to display this page correctly.

Thank you.