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MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX
« A partir de ce moment, mes jours
s’écoulèrent, exempts de crainte, dans des
milieux agréables, variés, fertiles en dis
tractions. Jefis, sur le champ de course, des
promenades charmantes et parfois lucrati
ves. Je fréquentai également les cercles où
l’on joue et dont la société est un peu mêlée,
sans autre inconvénient que de voir saisir
certains soirs mes enjeux. Mais lors de leur
irruption violente dans ces temples du
hasard et de la fortune, les soutiens de la
société ne me considérèrent jamais que
comme une victime ; ils témoignaient de la
compassion ; je n’eus qu’à me louer de
leurs égards. Enfin je visitai également la
Bourse et certaines demeures vouées à la
spéculation téméraire ou à l’exploitation
de portefeuilles ingénus. J’y rencontrai
parfois des espions débonnaires. Ils me
plaignaient, ils me disaient : « Prenez
« garde, monsieur ! vous feriez mieux de
« rester chez vous. » Mais nulle part je ne
vis une figure susceptible de me donner